Au sommaire du n°175

En couverture : « Printemps algérien : “Sortez le régime !” » (illustré par Maïlys Vallade).

Quelques articles seront mis en ligne au cours du mois. Les autres seront archivés sur notre site progressivement, après la parution du prochain numéro. Ce qui te laisse tout le temps d’aller saluer ton kiosquier ou de t’abonner...

Gilets jaunes

Gilets jaunes et réseaux sociaux – Facebook la poucave > Comme lors des printemps arabes, on a beaucoup glosé sur la symbiose entre Gilets jaunes et réseaux sociaux. Si les plates-formes numériques ont pesé dans la structuration du mouvement, elles ont aussi fourni le biscuit aux flics et aux juges.

Témoignage d’une daronne – « Les Gilets jaunes m’ont apporté une paix intérieure et un gros bordel dans ma tête » > « Gilets jaunes, quel est votre métier ?Ahou ahou ! », répond à pleine gorge ma mère en tête de cortège de la manifestation toulousaine, ce samedi d’Acte XVIII. Quelques minutes plus tard, je l’entends gueuler le sourire aux lèvres : « Il fait beau, il fait chaud, sortez les canons à eau... » Et quand on passe devant les CRS qui gardent farouchement l’entrée de la Chambre de commerce, elle beugle sourcils froncés : « Tout le monde déteste la police ». OK. Il y a quelque chose qui a bougé. Et ça a l’air sacrément profond. Entretien.

Retour sur le cas Geneviève Legay – Voyage au centre de l’indécence crasse > Au départ, on avait prévu de recenser les dernières déclarations politiques et médiatiques les plus atterrantes en matière de répression. Problème : il y en avait trop. Du coup, il a fallu resserrer, angler à la pro. Et quel meilleur exemple d’une parole puante et décomplexée que les réactions aux graves blessures de Geneviève Legay lors de l’acte XIX des Gilets jaunes à Nice ?

Matraques jaunes et police des cités – Mathieu Rigouste : « La répression conditionne la vie quotidienne des gens dans les quartiers ségrégués » > C’est peu de dire que le maintien de l’ordre à la française a été bousculé ces derniers mois : répression accrue, blessures en rafales, discours guerrier voire martial... Si cela ne comble pas le fossé avec les banlieues en matière de terreur policière, un glissement s’est indéniablement opéré. On le décrypte avec Mathieu Rigouste, auteur notamment de La domination policière : une violence industrielle et d’État d’urgence et business de la sécurité.

Reportage dessiné – Ma plus belle journée sur la plus belle avenue du monde > Samedi 16 mars, après avoir traîné mes grolles avec les copains et copines de la Marche pour le climat, je rejoins la manif des Gilets jaunes sur les Champs-Élysées, curieux de voir l’œuvre des collègues du matin...

Ailleurs dans l’actualité

Cancer nucléaire en Polynésie – Atomic Blues > L’ami Roland Oldham, fondateur de l’association polynésienne Moruroa e Tatou, défendant les victimes des essais nucléaires, est décédé à 68 ans dans la nuit du 15 au 16 mars dernier. Sa mort, d’un terrible cancer des os, est directement imputable à la politique militaire et coloniale française qui fit exploser 193 bombes en Polynésie de 1966 à 1996.

Par Caroline Sury

« Women’s March » à Kuala Lumpur – Femmes, LGBT : malaise en Malaisie > À Kuala Lumpur, la marche des femmes du 9 mars a été interdite par les autorités. Ça n’a pas empêché une joyeuse troupe d’activistes féministes et LGBT de manifester, secouant un peu les mœurs d’un pays bigrement conservateur. Reportage.

Flash-backs

Logement insalubre à Marseille – Revenir à Noailles > Le 5 novembre 2018, l’effondrement de deux immeubles de la rue d’Aubagne causa huit morts, comme autant de marques indélébiles sur le quartier de Noailles. Mais la secousse n’en finit pas de toucher les habitants du Marseille populaire, expulsés comme des fautifs de leur logement insalubre, après des années d’inertie municipale. Témoignage d’un habitant nostalgique du foisonnement de son immeuble, Tour de Babel décrépite.

Accidents mortels du travail chez les cordistes – Un silo de sucre et de dédain > Le 13 mars 2012, Vincent Dequin, 33 ans, et Arthur Bertelli, 23 ans, cordistes, meurent ensevelis sous des tonnes de sucre. Le 11 janvier 2019 s’ouvre le procès de leur accident au tribunal correctionnel de Reims. Sur le banc des prévenus, deux personnes physiques : Michel Mangion et David Duval, respectivement chefs d’établissement des entreprises Cristal Union et Carrard Services, son prestataire. Et deux personnes morales, ces mêmes entreprises, représentées par leurs avocats. Après sept ans d’instruction, la lumière sera-t-elle faite sur les circonstances de ce drame ?

Dossier « Printemps algérien : “Sortez le régime !” »

Photo Nadjib Bouznad

Introduction – « Vous ne pouvez pas nous tuer, vous êtes déjà morts ! » > En dépit des manœuvres du clan du pouvoir en Algérie consistant à retirer la candidature de Bouteflika pour se maintenir en place, la mobilisation n’a pas faibli. Depuis le 22 février, des millions d’Algériens et d’Algériennes se réapproprient l’espace public chaque vendredi à travers tout le pays. Par sa maturité, sa détermination, son humour, sa jeunesse, sa mixité, sa douceur, le mouvement contre le cinquième mandat a réussi à secouer un régime opaque et corrompu, incapable de préparer la succession de sa momie – signe d’une sérieuse fragmentation des clans qui constituent ce qu’on appelle avec dédain « le pouvoir ». Celui-ci pensait contenir un peuple résigné et endormi. Mais la parole est désormais à la rue qui n’entend pas la lâcher.

Changement de saison, changement de régime ? – Un mois dans l’Algérie des marches > Depuis le 22 février, les manifestations sont presque devenues une routine dans les rues algériennes. Vu de haut, on observe la foule, immense, venue dénoncer un régime corrompu depuis des décennies. Vu de près, on découvre la joie, la détermination et l’humour. Tentative subjective de restitution chronologique.

« La transition d’accord, mais dégagez d’abord ! » – Le manifeste du rire > Quand la politique est une blague, la blague devient politique. Ces dernières semaines en Algérie, l’humour, « brandi » dans les manifestations ou véhiculé sur les réseaux sociaux, est une forme d’expression privilégiée du ras-le-bol et de l’exigence d’un changement politique effectif.

Aux origines d’un parti hégémonique – FLN dégage ! > Depuis le surgissement du 22 février, le slogan « FLN dégage ! » a été largement repris par les manifestants, au point d’être aussi populaire que « Klitou lebled ya serrakine ! » (« Vous avez mangé le pays, bande de voleurs ! ») ou « Echaâb yourid isqat ennidham ! » (« Le peuple veut la chute du régime ! »), mettant ainsi la contestation algérienne au diapason des « printemps arabes » tant décriés par le régime depuis 2011. Dans ce texte, l’historien Nedjib Sidi Moussa revient sur la confiscation du pouvoir par ce parti, antérieure même à l’indépendance du pays.

L’armée des mots contre celle des morts – « On assiste à une reconquête poétique de la rue » > Entretien avec Sarah Haidar, jeune écrivaine algérienne libertaire et féministe, souffleuse de braises ravie de voir le feu se propager.

Sous les pelouses, la plage – Alger United > Dignes héritières de la lutte anticoloniale dans les clubs de foot, les tribunes des stades algériens sont un laboratoire de la contestation du régime depuis plus d’une décennie. Avec leurs chants protestataires et des slogans hostiles au pouvoir, les supporters sont devenus un des fers de lance des manifestations contre le clan Bouteflika. Au point que l’hymne du mouvement est une chanson venue tout droit des gradins. Reportage à Alger au plus près de ces fans, à l’heure où se prépare un derby opposant les deux plus grands clubs de foot de la capitale...

De la décennie noire à la révolution des sourires – « La jeunesse algérienne a transformé notre cynisme en espoir » > Avec 1994 (Rivages, 2018), Adlène Meddi exhumait le souvenir de la décennie noire dans un thriller sentant le vécu. C’est dire si le journaliste et romancier algérien a saisi combien le spectre des violences des années 1990 hante encore la mémoire collective du pays. Un traumatisme qui explique la nature inédite du mouvement en cours contre le régime. Entretien à Alger, au lendemain de la manifestation du vendredi 15 mars.

Instantanés de Marseille – « Gaudin, Bouteflika, dégagez ! » > Face à Alger, un homme tape sur son tambour et les plus jeunes exultent. Dimanche 17 mars, vent et soleil, c’est le rassemblement anti-Bouteflika sur le Vieux-Port. Marseille, « la 49e wilaya », comme se plaisent à dire les Algériens de la ville. Marseille où ils sont depuis si longtemps...

Et aussi...

Marché matrimonial et paternalisme patronal – Tournez boutique : un dimanche au bal des anciens > En Vendée, plus de mille personnes âgées se retrouvent chaque dimanche au thé dansant des Herbiers. En coulisses, les notables du coin financent leurs activités caritatives avec les bénéfices. Danseurs et danseuses, eux, viennent avant tout pour l’orchestre et pour compter fleurette.

Bouquins & bande dessinée

Planche extraite de "La Zad, c’est plus grand que nous", de Thomas Azuélos et Simon Rochepeau

Bande dessinée et poésie combattante – « La Zad est âpre et magique » > Thomas Azuélos et Simon Rochepeau viennent de commettre La Zad, c’est plus grand que nous (éd. Futuropolis), une BD sur Notre-Dame-des-Landes qui échappe aux pièges de la langue de bois. Récit choral, elle montre l’exceptionnalité de la situation et les contradictions qui traversent toute lutte de défense d’un territoire. CQFD a cuisiné l’ami Thomas.

Bouquin – Les histoires d’amiante finissent mal > Avec Amianto, une histoire ouvrière, Alberto Prunetti fait revivre son père, Renato, ouvrier mort de l’amiante, et rend hommage aux travailleurs, chair à usine de l’Italie du miracle économique. Le plus surprenant, c’est qu’il parvient à le faire avec tendresse et humour.

Les desserts de Goby – Lire au Fouquet’s > Où il est question des derniers livres de Clémentine Autain et de Pinar Selek...

Cap sur l’utopie – Ni Dieu, ni maître, ni mari > Un brûlot qui largue tout de bon les amarres, c’est le dernier roman de Daniel de Roulet. Dix petites anarchistes décrit ce qui arrive à la fin du XIXe siècle à dix jeunes pétroleuses impétueuses qui, chauffées au rouge et noir après les visites dans le coin de Mikhaïl Bakounine et d’Errico Malatesta, décident de s’en aller bâtir au bout du monde, dans l’archipel Juan Fernández (océan Pacifique), une communauté idyllique où régnerait « l’anarchie à l’état pur ».

Et enfin

L’édito – Sauce barbecue > « Il est dans un état… Il est sous l’eau », s’alarme un familier. « Rincé », « essoré », s’affolent d’autres. « Il a perdu la queue du Mickey, il n’arrive plus à l’accrocher », constate un ami. Un de ses « textoteurs du soir » va plus loin : « On n’est pas loin du burn-out. ». Une « petite main » abonde : « Heureusement qu’il est maquillé, sinon on verrait à quel point il est crevé… (Le Parisien du 30/03/2019) » On sait que Boutef, moufle usée dans laquelle s’agite la baronnie kaki algérienne, n’est pas au mieux de sa forme. Mais ce n’est pas de lui dont il s’agit dans cet article, mais bien de notre Manu national. Cocorico. [...].

Ça brûle ! – Dieu existe, il squatte notre local > Franchement, on est des warriors de l’enfer. Z’imaginez pas. Sortir un canard tous les mois avec une équipe de bras cassés de ce niveau, c’est limite miraculeux. Et qu’on tienne depuis 175 numéros, c’est sans doute la meilleure preuve qu’un Dieu veille sur les éclopés – un genre de grand morse céleste affalé sur les nuages, toisant l’agitation terrienne en tirant sur son joint. Le présent numéro a ainsi traversé diverses tempêtes des plus agitées... [...].


La Une du n°175 de CQFD, illustrée par Maïlys Vallade

Le numéro 175 de CQFD est paru le vendredi 5 avril. Il sera en kiosque jusqu’au jeudi 2 mai.

La Une du n°175 en PDF
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