C’est pas l’harissa

Dans l’aube naissante, j’ai reçu ce texto de mon pote Jean-Marc (qui peut donc être, dans les heures où le jour pointe, d’une suprême délicatesse) : « J’ai super mal au cul, c’est l’harissa que j’ai mangée hier, ou c’est François Hollande ? » (Je l’avais pourtant prévenu, quand il m’a dit, en mai dernier, qu’après avoir voté pour Mélenchon au premier tour de l’élection présidentielle, il avait mis dans l’urne, deux dimanches plus tard, un bulletin frappé du nom d’Hollande : en septembre, je lui ai annoncé, t’auras un méchant mal de cul, et tu me diras que t’aurais pas dû, et moi ? Je me foutrai de ta gueule, espère, je vais être sans pitié, sur ce coup-là. Et comment ça se passe ?

Pile comme j’avais pronostiqué1 : j’ai plusieurs autres potes (dont je tairai ici les patronymes, par respect pour leurs pauvres familles) qui ont voté pour les « socialistes » – exactement comme si ces odieux personnages n’avaient pas déjà fait plus de fois que nous n’en pourrions compter sur nos vingt doigts (pieds compris) la preuve de leur dégueulasse vilenie –, et ils se baladent tous avec des coussins à mémoire de forme. Pour pouvoir s’asseoir sans pousser d’horribles zurlements de douleur.)

Dans un premier temps : j’ai réservé ma réponse. (À Jean-Marc : ça serait bien que tu suives un peu.) D’abord parce que, depuis que j’ai encore arrêté de fumer : je refuse catégoriquement d’entrer le matin dans un échange de SMS avant d’avoir bu mon café. (Et fumé une cigarette, bien sûr.) Ensuite parce que je voulais me donner le temps de la réflexion – et de chercher chez Google si des fois l’harissa ne pourrait pas réellement provoquer des douleurs du fondement : non que j’y croie, mais ça valait le coup d’être vérifié, on est journalistes, oui, ou merde ?

Puis j’ai successivement découvert, dans les heures qui ont suivi, que le nouveau ministre von Staatssicherheit – Manuel Valls – avait de nouveau fait évacuer un campement de Roms.

Puis : que le sénateur de (lointaine) droite Serge Dassault trouvait ledit Valls tout à fait admirable. Puis enfin : que (toujours) le même Valls, manifestement désireux de doubler sur son flanc parano-sécuritaire son prédécesseur (l’inoubliable Claude Guéant), promettait de virer 7 000 « Roumains et Bulgares » avant la fin du mois de septembre. (Car, a-t-il expliqué : on peut pas « accueillir chez nous toute la misère du monde », hein, Marine ?)

À ce moment-là, j’ai vomi – comme souvent, j’ai remarqué, quand j’entends ces temps-ci parler de certain ministre. Et finalement, j’ai répondu à Jean-Marc : « Je dirais que c’est pas l’harissa. »


1 Tu peux m’appeler Nostradamus, si tu veux : je te ferai payer aucun supplément.

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