Rage dedans

Triste tropisme

Un truc qu’il faudrait que tu comprennes, à la fin des fins : on. Ne. Contient. Pas. L’extrême. Droite. En. Copiant. Ses. Codes.

En singeant ses horribles manières. En la laissant arbitrer les élégances propagandaires.

T’étais là, tu pensais avoir découvert une espèce de martingale, pas vrai ? Tu t’es dit : vabbè, je vais changer quelques petits trucs. Plutôt que de tenir une ligne complètement digne, je vais aller patauger dans quelques boues pénistes. Lâcher quelques signaux comme on lance des lignes. C’est pour la bonne cause : ça justifie les moyens. Et tu es allé un peu loin.

Tu t’es fait de longs gargarismes à la « laïcité », en faisant mine de ne pas savoir que ce mot était devenu dans l’époque le mot de passe dégueulasse de la xénophobie décomplexée. Tu as dit – puis regretté, mais qui peut te croire assez naïf pour n’avoir pas précisément calibré cette fière saillie - une vraie saleté sur les « travailleurs détachés » qui « vol(ai)ent le pain » des salarié.e.s françai. se.s. Tu as déclaré que dans ces matières, tu n’étais pas forcément contre quelques « quotas » – pourquoi pas, des fois, faut voir. Tu as proclamé, pris par l’élan, que tu n’avais jamais été « pour la liberté d’installation ». Tu as tranquillement exalté, au si cauteleux prétexte de son « universalisme », la France des colonies – bordurière du Brésil, présente partout dans le monde, de Mayotte à Nouméa. Tu t’es fait une bannière de ton patriotisme. Tu as, comme ceux d’en face, pavoisé tes meetings de drapeaux tricolores – et viré ceux qui n’étaient que rouges. Tu as fait chanter partout La Marseillaise plutôt que L’Internationale. Tu as tout soudain retiré de ton lexique de rhéteur old school un tout petit mot : « Gauche ». Comme s’il était devenu dangereux.

Tu as donné des gages – mais à qui, mais à quoi ? Tu es parti à la pêche aux voix comme on entre en abdication – mais pour quel résultat ? Au soir du premier tour – on attend dans l’angoisse le résultat du second en écrivant ces lignes –, tu as pu constater que cette fine stratégie t’avait surtout valu d’être giclé de la course. Durant que la Pen y restait.

Tu peux continuer, après cela, d’écouter celles et ceux qui se et te racontent – le moyen de faire autrement, après l’avoir tant validé – que ton renoncement à tant de bases est ce qui t’a malgré tout permis de marquer des points électoraux. (De « prendre date pour les législatives », comme ils disent si poétiquement.)

Tu peux en somme continuer à considérer que c’est en te calant sur la droite que tu reconstruiras une gauche.

Mais tu sais quoi ? Ça sera sans nous.

Sébastien Fontenelle
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