Édito-sommaire
Au sommaire du n°153
En une : "La police tue" de Étienne Savoye.
Un article sera mis en ligne, chaque semaine. Les autres articles seront archivés sur notre site quelques mois plus tard. D’ici-là, tu as tout le temps d’aller saluer ton kiosquier ou de t’abonner...
Héritage
Ce sont mes parents, honnêtes jusqu’à l’oubli de soi, volés tous les jours par des plus riches et plus puissants qu’eux, qui ont pourtant relayé auprès de moi le mot d’ordre de leurs détrousseurs : « voler est indigne ».
Ce sont mes parents, revenant chaque jour assommés d’un travail déformant et humiliant, qui ont relayé auprès de moi le mantra de leurs patrons : « le travail est une source de fierté ».
Ce sont eux également, qui faisaient briller à mes yeux l’éclat du suffrage universel, au nom de leur participation à une victoire historique pour laquelle tant de luttes violentes s’étaient déroulées. Ils ont voté à chaque fois, opiniâtrement, pour être tenus à l’écart de l’organisation de leur vie. J’ai longtemps moi-même cédé à ce chantage et voté, revoté, jusqu’à devenir fou des contradictions où ça m’entraînait.
Je n’ai jamais travaillé. Je n’ai jamais eu la moindre considération pour l’ordre, le travail, la loi, la police, l’argent, le pouvoir même et surtout le pouvoir que je pourrais exercer sur quiconque. Je n’y ai vu que différentes formes de brutalité dans l’exercice continu de la machine de mort qui empoisonnait mes parents et qui œuvrait déjà à empoisonner la mienne. J’ai vu avec clarté, autour de l’âge de 12 ou 13 ans, la mort qui m’attendait. Ce fut bien plus saisissant, terrible et beau qu’une révélation mystique. Il n’y a aucune forme de vérité plus puissante que celle-là et plus susceptible de donner un sens à toutes vos actions : ne jamais laisser rien ni personne accélérer votre pas vers la mort. Il n’y a pas une heure de sa vie qui mérite d’être sacrifiée pour quelque chose d’aussi futile qu’une nation. Il est futile de se demander si tel ou tel candidat est plus digne de diriger nos vies et de prétendre à nous représenter : ils sont tous les codirecteurs d’une entreprise de démolition de notre quotidien. Faisons la grève. Nous n’avons aucune raison de nous associer au plan de carrière d’une poignée de voleurs qui défendent leur butin et leurs règles de voyous en armant une police d’assassins. Nous avons mieux à faire, chaque jour, en creusant l’écart qui nous éloignera d’eux. Cet écart, nous pouvons l’appeler la vie.
L.L. de Mars
Dossier : La police tue
Voix rebelles de Saint-Denis > 16 mars. Sous le dôme de la Maison des étudiants de Paris 8 (Saint-Denis), le collectif Paroles non-blanches organise une journée contre les violences policières. Sur le parvis, une responsable engueule les jeunes femmes qui ont investi la salle sans permission.
Homicide volontaire avec sursis > Mars 2017. Le policier Saboundjian comparaît devant la Cour d’assises de Paris pour la mort d’Amine Bentounsi, tué d’une balle dans le dos. Il écope de cinq ans de prison avec sursis. Chronique d’un procès paradoxal qui aura rendu une justice digne d’un conseil de discipline.
« Je suis née le jour de la mort de mon frère » > Il y a bientôt dix ans, Lamine Dieng mourait dans un fourgon de police. Depuis, sa sœur Ramata est sur le pont. Elle a compris que justice ne serait jamais rendue, mais qu’il faut quand même se battre – question de dignité. Cette double certitude s’est enfin imposée, plaçant la mobilisation des quartiers contre les violences policières au cœur du mouvement social.
Bobigny ne se rend pas > On l’a croisé le samedi 11 février à Bobigny, à proximité d’un car régie de RTL transformé en braséro. Samy, 27 ans, du « département 99 », est venu participer au rassemblement contre les violences policières organisé à la suite du calvaire de Théo à Aulnay-sous-Bois. Souriant, prodiguant conseils de prudence et éléments d’analyse stratégique, Samy distribuait à pleines mains des doses de sérum physiologique. Et impressionnait par son calme face aux tirs de FlashBall qui crépitaient. Il nous a envoyé ce témoignage.
Pas de lycée sans feu > Ce qu’il s’est passé au lycée Suger le 6 mars 2017, on peut le voir dans l’excellent documentaire des Docs du Réel Sur Suger, disponible en ligne. Des gamins jetés en pâture à la police pour subir humiliations, violences et racisme d’État, suite à un chahut teinté de protestations contre les crimes policiers. Ce qu’il ne s’est pas passé ce jour-là, c’est toute l’histoire d’une école de banlieue...
« On va continuer à écrire des histoires ensemble » > Dans la cafétéria qui fait face à la gare d’Argenteuil (Val-d’Oise), CQFD a bavardé avec Omar Slaouti, membre du Collectif Vérité et Justice pour Ali Ziri et l’un des organisateurs de la Marche pour la Justice et la Dignité du 19 mars à Paris.
Roses d’acier contre main de fer > Arrestations arbitraires, harcèlement verbal et physique, voire viols... À Belleville, quartier de l’Est parisien, les travailleuses du sexe chinoises subissent d’incessantes violences policières. Conditions de femmes migrantes et criminalisation de la prostitution s’entrecroisent ici sur un terrain propice à l’impunité policière.
Procès d’intentions > On l’oublie parfois, mais le marteau du juge est du même métal que la matraque du policier. Les inconscients qui manifestent contre l’impunité des forces de l’ordre ont tout à craindre de la justice, surtout quand celle-ci a le pouvoir de voyager dans le temps et de vous condamner pour des faits que vous n’avez pas encore commis.
Quand les képis font la loi > Et si la police n’était plus seulement le bras armé de l’État, mais une force d’occupation autonome, capable de dicter sa loi aux politiques ? Éléments d’analyse avec Mohamed, membre du collectif Quartier 21 et militant aguerri contre les violences policières.
Et aussi...
Ali Ziri, mort d’un chibani
Les racines du mal (et des résistances)
Enquêtes et reportages
« J’ai rêvé d’un centriste » > Marseille, 1er avril. Pendant que Bennahmias affirmait son soutien à Hamon à la fin d’une réunion PS où quinze bougres se chamaillaient, Macron déployait son plus beau sourire pour un meeting à guichets fermés.
Archipel d’attente > L’arrivée, en 2015, de près de 850 000 personnes sur les îles grecques a permis à l’Union européenne de justifier la « solution hotspot » : une flopée de camps insalubres où parquer des réfugiés jugés indésirables. Bloqués pendant des mois dans celui de Samos, plus d’un millier d’entre eux attendent, indéfiniment, de pouvoir en sortir.
Un mouchard dans la peau > Après avoir infecté les étiquettes de nos fringues, les animaux domestiques et tout un panel de cartes, les puces RFID entendent coloniser nos corps. Des salariés servent déjà de joyeux cobayes. Début d’un cauchemar ou vaste supercherie ? Éléments de réponse.
Touchez pas à La Plaine > Pour sa 18e édition, le carnaval des quartiers de la Plaine, Noailles et des Réformés a ridiculisé, condamné et brûlé le projet de rénovation municipale de la place Jean Jaurès. Reportages photo.
Les trompettes de Babylone > Juliette Volcler, camarade de la nébuleuse CQFD, vient de commettre un nouvel ouvrage : Contrôle. Comment s’inventa l’art de la manipulation sonore (éd. La Découverte – La Rue musicale). Elle y détaille l’histoire d’Harold Burris-Meyer, anonyme nuisible à qui l’on doit des usages du son dans l’industrie, la guerre...
Sur le pont du pognon > Décembre 2010, Philippe Pascal, inspecteur de l’Urssaf, est averti par les services fiscaux qu’un employeur d’Avignon, François Mariani, aux fonctions longues comme un jour de travail et gérant de l’hôtel 4 étoiles des Agassins, commet de fâcheuses irrégularités.
Et aussi...
Mais qu’est-ce qu’on va faire d’Aude Lancelin ?
Cave canem : retour sur le Décodex
L’ascension raté du Mon Squat par la face Sud
Chronique série
Cet article a été publié dans
CQFD n°153 (avril 2017)
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Paru dans CQFD n°153 (avril 2017)
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Par
Illustré par Rémy Cattelain, Aurel, L.L. de Mars, Étienne Savoye
Mis en ligne le 07.04.2017
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Dans CQFD n°153 (avril 2017)
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