Panthère Première sort les crocs !
Ce 29 septembre, nous avions rendez‑vous avec une panthère. Mais pas n’importe laquelle ! Panthère Première : la toute nouvelle revue, fondée, animée et éditée par un collectif de quinze femmes et zéro mec (certains articles ou illustrations sont par contre signés par des hommes). Une partie de l’équipe avait fait le déplacement au café‑librairie Michèle Firk, à Montreuil, pour présenter cette nouvelle canarde. Pour partie, nous nous connaissons depuis des années. Certaines ont déjà œuvré dans les pages de CQFD ou avec nos amis des revues Jef Klak ou Z. Dans le public aussi, nous retrouvons des copains et copines de ce petit « milieu » de l’édition indépendante… Une ambiance presque familiale, avec tartines d’houmous maison, bière locale et bonne humeur.
Le collectif de Panthère Première revient de deux jours de réunion pour préparer le n°2. Ses membres disent qu’elles sont crevées, qu’elles n’ont rien préparé… Mais en vérité, nous sentons la joie d’être là et de présenter leur boulot : 100 pages d’articles et d’illustrations inédits, un an et demi de travail, un dossier « Quiproclash », trois graphistes, des heures de réunions et un horoscope. Le tout dans un format souple qui se range dans un sac pour se lire partout, se donner ou s’échanger. Simple, efficace, beau et agréable à lire. Bien joué !
« Une place à chacune »
Une première panthère brosse rapidement l’historique de la revue : « C’est en février 2016 qu’on a tenu la première réunion, mais ça faisait un moment qu’on y réfléchissait. À chaque fois qu’on se croisait, dans d’autres journaux ou entre amies, on se disait : ‘‘ On devrait vraiment la faire, cette revue en non-mixité éditoriale ! ’’ On est même allés plus loin, en étendant la non‑mixité aux tâches techniques (site internet, maquette), généralement plutôt dévolues ou réservées aux mecs. »
Une seconde panthère revient rapidement sur le partage généralement genré des tâches dans une rédaction, fût‑elle « indépendante » : les hommes écrivent et décident plus. Aux femmes, la mission de corriger, gérer, traduire. « Ça évolue un peu. Lentement. » Il s’agissait aussi de voir si une rédaction non mixte changeait effectivement les façons de travailler. Réponse d’une troisième panthère : « C’est le cas. On a les mêmes difficultés et engueulades, le même travail. Mais les façons d’y faire face diffèrent : on se parle plus. Non pas parce qu’on serait par essence plus douces et compréhensives, mais parce que nous partageons les mêmes oppressions de genre. Nous avons appris à donner une place à chacune. »
Modèle économique
Au final, Panthère Première est une revue généraliste qui ne fait pas que traiter des questions féministes. Mais qui traite ses sujets avec un regard féministe. Ses articles explorent en quoi la « sphère privée » renvoie en fait à des questions éminemment politiques. D’une expérience personnelle en hôpital psy à celle d’une femme racisée (article signé par l’excellente Mélusine1 ) ou à la mécanique sentimentale hétéro…
Les membres du collectif expliquent aussi comment elles envisagent (ou espèrent) un modèle économique différent de ce qu’elles ont connu ailleurs –- « C’est fondamental ! » Avec ce semestriel vendu 8 € en librairie, elles payeront, même a minima, tous ceux et toutes celles qui participent, d’une manière ou d’une autre. Un vrai challenge ! Tout autant que leur concept de « revue école » : prendre le temps d’accompagner dans l’écriture d’articles des personnes qui n’en ont pas l’habitude.
Au final, une soirée riche d’informations, de rires, de curiosité et de débats. Et qui se conclut, comme cet article, sur une question du public : « D’où vient le titre ? » « Ben ça, c’est la question interdite, rigole une panthère. Mais c’est quand même plus classe que ‘‘ Poule seconde ’’, non ? »
1 A lire, son interview dans CQFD n°157 : « À la croisée du féminisme et de l’antiracisme ».
Cet article a été publié dans
CQFD n°158 (octobre 2017)
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Paru dans CQFD n°158 (octobre 2017)
Dans la rubrique Médias
Par
Mis en ligne le 16.01.2018
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