L’édito du n°234
Non-assistance à minots en danger
Le cerveau rivé sur les ruines sanglantes de Gaza, de Cisjordanie et du Liban, l’âme politique en berne face à la pantalonnade hexagonale et la gueule flétrie d’Adolpho Retailleau crachouillant « de l’ordre, de l’ordre, de l’ordre », on cherche de l’air. Avidement. Dans un tel contexte, toute manifestation d’hostilité au pouvoir est forcément bienvenue. Mercredi 25 septembre à Paris, lors d’une mobilisation historique, c’était au tour des professionnel·les de la protection de l’enfance de se véner. Rassemblé·es dans un collectif nommé Les 400 000 (estimation du nombre de mineur·es subissant des violences intrafamiliales et ayant besoin d’être protégé·es), elles et ils dénoncent « les défaillances criantes d’un système à bout de souffle », raconte un article de Libé1. Oui, pas la joie, mais au moins ça rue chouïa dans les brancards.
« Chaque jour, des enfants reconnus victimes s’accumulent sur liste d’attente, sans être sortis du danger. »
Que racontent ces expert·es de la protection de l’enfance ? La même chose que les infirmières, les ASE, les profs, les postières, les soignant·es en EHPAD, et toutes celles et ceux qui portent à bout de bras le service public : elles et ils n’ont plus les moyens de faire leur taf correctement. « Tous les dispositifs de la protection de l’enfance sont saturés », explique le collectif. Pénurie de professionnel·les, juges des enfants surbooké·es, défaut d’application des lois sur la protection de l’enfance. « Chaque jour, des enfants reconnus victimes s’accumulent sur liste d’attente, sans être sortis du danger. » C’est le principe de la Macronie : que tu sois SDF ou bambin (voire les deux – ils sont plus de 2 000 à cumuler), exilé ou vieillarde, chômeur ou handicapée, tout sera fait pour te pourrir la vie et empêcher toute main secourable de se tendre vers toi.
« Parce que c’est notre projet », braillait le sociopathe en chef il y a un bail. Défait dans les urnes, il a opéré un genre de coup d’État démocratique pour imposer une naphtaline gouvernementale à l’odeur de vieux pipi (Barnier, sans déconner ? Et pourquoi pas Georges Clemenceau ou René Coty ?). Il nous tarde fort de défaire le grand hold-up économique, social et politique que cette caste de pelles à merde poursuit jour après jour. Pour ça, toujours : la solidarité, la rue, la grève. Et si tu ne dresses pas de barricades pour toi, fais-le pour les minots. Quand Gavroche 2024 tombera à tes côtés, sûr que tu l’entendras chanter : « Je suis tombé par terre, c’est la faute à Jupiter, le nez dans le ruisseau c’est la faute à Retailleau. »
1 « À Paris, “mobilisation historique” du secteur de la protection de l’enfance “à bout de souffle” », Libération (25/09/2024).
Cet article a été publié dans
CQFD n°234 (octobre 2024)
Dans ce numéro, on revient avec Valérie Rey-Robert sur ce qu’est la culture du viol dans un dossier de quatre pages, avec en toile de fond l’affaire des viols de Mazan. On aborde aussi le culte du patriarche et les violences sexistes dans le cinéma d’auteur. Hors-dossier, Vincent Tiberj déconstruit le mythe de la droitisation de la France. On se penche sur les centres d’accueil pour demandeurs d’asile en Italie, avant de revenir sur la grève victorieuse des femmes de chambres d’un hôtel de luxe à Marseille. Enfin, on sollicite votre soutien pour sortir CQFD de la dèche !
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Paru dans CQFD n°234 (octobre 2024)
Dans la rubrique Édito
Par
Illustré par Kalem
Mis en ligne le 13.10.2024
Dans CQFD n°234 (octobre 2024)
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