Un constat s’impose : l’accélération ultralibérale nous est passée dessus comme un train bondé de startupeurs décérébrés, et les espaces de fuite se raréfient. Finie l’époque où on revendiquait pépouze le volem rien foutre al pais [1]. La tendance, c’est France Travail (famille, patrie), traque au temps libre et chasse aux improductif·ves. Qu’on soit chômeur·se ou retraité·e, il faut se battre et se justifier pour chaque centime perçu hors du turbin. Et quand on arrive enfin à se poser, on réalise que quasiment tous les espaces de nos vies, y compris ceux où on rêvasse, sont soumis à une injonction de rentabilité.
On pourrait se dire, cui cui c’est l’été, justement le moment où on peut enfin déconnecter. Mais entre celles qui triment et ceux qui bénéficient – encore – des congés payés, ceux qui s’auto-exploitent et celles qui font des burnout à répétition alors que les richoux font joujou avec les JO et leurs valeurs nauséabondes, et que, comme grosse cerise sur le gâteau, le fascisme tape bien fort à nos portes, on se dit, rire jaune, qu’au final on sort ce dossier au meilleur des moments. Youpi.
Dans les pages qui suivent, on vous parle aussi biende « discrimination par le rythme » au fil des siècles avec l’historien Laurent Vidal que detraque aux chômeurs à Pôle emploi/France Travail, du rapport à l’« indolence » comme résistance dans les quartiers populaires de Marseille avec la photographe Yohanne Lamoulère, que d’un chanteur du fabuleux groupe Astéréotypie qui revendique l’application pour sa pomme du statut de « pacha ».
On s’y pose égalementla question du travail gratuit, des vacances « rentables » en ces temps d’instagrammisation du monde, et on va même jusqu’à revendiquer de meilleures conditions de travail pour les acteur·ices de téléréalité). Bref, malgré les nuages, on a tenté de vous offrir un peu de légèreté dans ces temps si pesants, tout en lançant des pistes vers une lutte qu’il ne faut pas lâcher : faire voler l’enclume du Travail dans la vitrine cradosse du capitalisme.
[/Dossier coordonné par Émilien Bernard et Pauline Laplace/]