Police

Roms méchamment arrangés

Traques, coups, humiliations : les Roms sont un gibier de choix pour certains policiers zélés. Mais, pour une fois, un procureur général a daigné tendre l’oreille sur une de ces opérations, révélée en décembre 2011 par CQFD. Ce qui laisse toutefois les victimes dans l’inquiétude…
par Soulcié

L’enquête n’aura pas été simple pour identifier les quatre policiers impliqués, le 22 novembre 2011, dans une expédition violente contre des Roms, à proximité de l’église Saint-Martin d’Arenc, dans le iiie arrondissement de Marseille1. Rappel des faits : une équipe de trois flics, dont une femme, bientôt rejointe par un quatrième collègue, agresse un groupe de Roms. Ils détruisent les stocks de nourriture, gazent hommes, femmes et enfants, et l’un des fonctionnaires exhibe même son arme de service. Ils insultent, se moquent et frappent à tel point qu’une des victimes se casse le col du fémur. Et tous racontent qu’ils les connaissent bien, ces agresseurs en uniforme, puisqu’ils viennent régulièrement les harceler et les menacer.

En janvier 2012, un responsable de Médecins du monde écrit un courrier pour signaler ces faits au procureur qui, à la surprise de quelques avocats du barreau marseillais, transmet le dossier à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices. Le 8 février, un bœuf-carottes décide d’auditionner à nouveau le jeune homme gravement blessé suite à une chute consécutive aux coups donnés par les forces de l’ordre. Le témoignage concorde en tous points avec celui rédigé peu après les faits par des membres d’une association locale proche des Roms. Mais, problème ! Il semblerait que la virée sauvage de ces sbires en uniforme n’ait pas été signalée sur le cahier de service du commissariat dont ils dépendent. L’IGPN ne dispose… que de la description précise et détaillée des agresseurs, mais non de leur identité.

Ha, le bon vieux numéro de matricule qui permettait d’identifier plus aisément les flics… L’on comprend mieux pourquoi son retour évoqué aujourd’hui par le nouveau ministre de l’Intérieur fait bondir les syndicats de police. Ces derniers affirment, sans rire, qu’une telle mesure jetterait la suspicion sur les forces de l’ordre2

Contre toute attente, les quatre policiers sont finalement identifiés par leurs victimes à travers une vitre sans tain le 20 mai dernier. Placés en garde à vue, ils ne sont pas pour l’heure mis en examen. « Loin d’être apaisées, les victimes restent très inquiètes. Leurs agresseurs sont toujours en fonction, et les familles redoutent d’être harcelées… », confie à CQFD une source proche du dossier. Si la procédure se poursuit, il est possible que ces arrangeurs de Roms soient convoqués par un juge d’instruction avant d’éventuellement se voir infliger devant un tribunal une condamnation d’une « sévérité exemplaire ». Éventuellement. À titre d’exemple : les deux policiers qui, sous l’œil de la caméra d’un voisin, ont frappé un jeune de Montfermeil (Seine-Saint-Denis), en octobre 2008, ont été condamnés à quatre mois de prison… avec sursis.


1 Relire « Raid sur les Roms », CQFD n° 95.

2 Le numéro de matricule des policiers a été supprimé en 1985 par le ministre de l’Intérieur Pierre Joxe (aussi appelé Monsieur-je-savais-pas, cf. CQFD n°97) lorsque a été adopté le nouvel uniforme dessiné par le couturier Pierre Balmain…

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