Saturday fever
Le samedi (4 juin) matin, dans Libération, un certain Mathieu Lindon-que-son-nom-donne-envie-de-chercher-quelques-riches-rimes narre tranquillement qu’il redoute assez fort que « l’affaire Strauss-Kahn » et « le cas Georges Tron » n’aient pour effet (tu vas voir comme c’est pe(n)sé) que « la campagne 2012 soit : “Je te tiens, tu me tiens par la bistouquette” ».
(Si, si, je te promets : il dit « bistouquette ».)
Même : il craint, non moins, qu’on ne voie désormais « des hommes politiques vierges de toute imputation sexuelle insultés par leurs électeurs : “Pisse-froid, impuissant” ».
On lit ça, on se pince, et on va pour le relire, non par plaisir, évidemment (y a pour ça le dernier SAS), mais pour vérifier qu’on l’a bien lu la première fois1, et que le triste mec a bien écrit tout ça – mais voilà qu’il est déjà 14 heures de l’après-midi, et que nous arrive chez le kiosque Le Monde, où une certaine « Sylviane Agacinski, philosophe » (dont nous allons tout de suite vérifier qu’elle est de fait agacinskante), rédige que dans cette si pénible « affaire » de « l’accusation portée contre DSK », la « plaignante » est, certes (force est de constater), la « présumée victime d’une tentative de viol » (veuillez agréer l’expression de notre pareillement présumée compassion), mais que, s’il te plaît René : « prenons garde toutefois de ne pas sacrifier la vie privée, à laquelle chacun a droit, sur l’autel d’une transparence redoutable », parce que ça, vraiment (et comme nous avons coutume de constater, nous autres philosophes d’haut niveau), ça serait pas bien du tout, vu que « faire tomber toute limite entre la sphère privée et la sphère publique relève d’une logique totalitaire ».
Et, bon, dans la vraie vie, bien sûr : nul(le) n’a encore enfilé, qu’on sache, un brassard nazi pour exiger qu’on abolisse dès cette nuit la frontière entre les sphères – mais va-t-on se laisser corseter le philosophage pour de si petits riens ? (Si petits que même Éric Ciotti les dépasse d’une tê… D’une demi-tête ?)
Of course que non, mâme Dupont : ça serait gâcher.
Puis l’important, nespa, reste qu’au soir d’un samedi de presse (de référence) ordinaire, nous ayons successivement lu, sans vomir plus que de raison, qu’une plainte pour viol relevait de la catégorie des « imputations sexuelles » (et non criminelles, comme on aurait pu très bêtement supposer), puis que si que ton élu de proximité n’a pas mis sa teub sur quelqu’un(e) qui n’y consentait guère, faut pas non plus que le gars s’étonne de se faire traiter d’atrophié de la gonade, puis enfin, et pour conclure sur une note un peu soutenue, qu’il ne faut tout de même pas trop en faire, avec ces affaires de présumées victimes, hein. Parce que bon, la distance de sécurité, okay, très bien, ça peut même faciliter le vivre ensemble, mais faut pas non plus en abuser – ou alors si, mais dans ce cas-là faudra pas s’étonner quand les phalanges de l’ordre noir viendront toquer à l’huis.
1 Je sais que c’est un peu technique, comme explication : j’espère que tu suis ?
Cet article a été publié dans
CQFD n°90 (juin 2011)
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Paru dans CQFD n°90 (juin 2011)
Dans la rubrique Rage dedans
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Mis en ligne le 19.07.2011
Dans CQFD n°90 (juin 2011)
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