Le dossier

Qui veut la peau des ruraux ?

C’est qui au juste les ruraux ? Et c’est quoi leurs galères et leurs aspirations ? Depuis trop longtemps, les voix rurales sont confisquées par le bavardage de la classe bourgeoise, ou altérées par les mégaphones de l’extrême droite. Dans ces dix pages de reportage, témoignage et interview, nous interrogeons celles et ceux qui s’attachent à analyser la ruralité de près plutôt qu’à la juger à coup de clichés.
Elias

Oooooh la campagne, ça nous gagne ! Un petit tour avec la bagnole collective pour aller buller devant les libellules du Lubéron, le temps d’un week-end, avant de retourner respirer l’air marin (mais pollué) de notre ville chérie ? Plus audacieux : fuir une semaine dans les Cévennes pour se la jouer old school, ramasser des châtaignes en sandales et se bourrer le bide de légumes multicolores, pendant que le monde brûle ? Complètement zinzin : disparaître pendant des mois pour se planquer dans des carlouch’ en espérant échapper à l’apocalypse ?

Plus sérieusement, oser écrire un dossier sur la campagne quand on n’y vit pas au quotidien relève du mauvais gag : comment ne pas l’essentialiser et tomber dans l’écueil du regard tantôt idéalisé, tantôt méprisant, que portent les urbains que nous sommes, sur ce qu’on apprend à nommer « la ruralité » ? Parce qu’ici, la plupart de la rédac a dû quitter sa terre au grand air pour venir tenter sa chance en ville… Et, finalement, échouer dans la grotte du local, un brin nostalgique de nos belles années où on traversait à toute berzingue sur nos VTT pourris les champs de maïs OGMisés, les centres-villes déserts et les zones commerciales claquées. Toute une époque ! Y a rien à faire, même de loin, ça reste en nous… Alors, on a voulu en parler mais en essayant de rester humbles, en interrogeant celles et ceux qui s’attachent à l’analyser de près plutôt qu’à la juger à coups de clichés.

C’est qui au juste les ruraux ? C’est quoi leurs galères et leurs aspirations (pp. II & III) ? Augmentation des loyers, gentrification, étalement urbain, néo-ruralité… Que ce soit à deux pas des grandes villes, comme à Castelnau-le-Lez (Hérault) où l’on bétonne frénétiquement (p. VI), ou au fin fond des Pyrénées béarnaises où débarquent les Bordelais (p. IV), les ruraux sont souvent menacés dans leur mode de vie. Et bien naïf celui qui croit que les urbains pourront les sauver (p. VII) ! Car les ruraux se débrouillent parfaitement bien sans eux en bricolant leur petit monde quand le grand vacille (p. V). Certains résistent comme elles et ils peuvent pour remobiliser à gauche (p. VIII) et persistent à y vivre autrement que sous le régime de l’hétéropatriarcat (p. IX). Et si on n’y est pas toujours très bien et un peu paumé, y’a plus qu’à poser son flow sur les bouses fumantes, les noms de bleds éclatés et les vieux réacs qui cancanent sur les bancs (p. X) !

Alors, qu’on l’ose : à nos bleds tout pourris qui rient comme ils souffrent, qui meurent comme ils vibrent, gardez la tête haute ! Contre les bourgeois nian-nian, les maires corrompus, les néobranchouilles, les promoteurs véreux, le grand capital et les fachos nostalgiques, villageois·es de tous les pays, unissez-vous !

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Cet article a été publié dans

CQFD n°240 (avril 2025)

Dans ce numéro, un grand dossier « ruralité ». Avec des sociologues et des reportages, on analyse le regard porté sur les habitants des campagnes. Et on se demande : quelles sont leurs galères et leurs aspirations spécifiques, forcément très diverses ? Et puis, comment faire vivre l’idée de gauche en milieu rural ? Hors dossier, on tient le piquet de grève chez un sous-traitant d’Audi en Belgique, avant de se questionner sur la guerre en Ukraine et de plonger dans l’histoire (et l’héritage) du féminisme yougoslave.

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