« Environ trois cent mille contrôles domiciliaires sont effectués chaque année par la Caisse d’allocations familiales [CAF] » , nous apprend la très instructive brochure réalisée par les CAFards de Montreuil. Hé oui ! À tout moment, un gus de la CAF peut se radiner chez vous pour éplucher vos déclarations, et vérifier que vous ne vous gavez pas de coquillettes discount sur le dos des aides sociales. En ces temps de traques aux fraudeurs – responsables, en vrac, de la crise, du chômage, du racisme, du réchauffement climatique, de la violence dans les cours d’école et des escarres de pépé –, ce « collectif de chômeurs et précaires qui se sont regroupés pour se défendre face aux institutions sociales » fournit là quelques infos de première bourre pour ne point être pris au dépourvu en cas d’inspection inopinée. « Celui que la CAF appelle “fraudeur”, précise le collectif, c’est le Rsaste qui se fait aider par sa famille pour arriver à la fin du mois, c’est la mère qui ne déclare pas son compagnon pour garder son indépendance et ses maigres revenus, c’est l’intermittent du travail au black qui veut éviter une chute de revenus catastrophique. » Pas vraiment l’univers de Bernard Madoff, mais bien celui des galériens à qui l’on octroie gracieusement quelques miettes tout en cherchant à les culpabiliser… « Il n’y a pas de règle formelle, les contrôles peuvent toucher tout le monde. Mais de fait, il peut y avoir des catégories ciblées. » Et la CAF a ses chouchous : « On sait déjà que la plupart des mères isolées se font contrôler régulièrement. Les Rsastes sont également plus ciblés que les autres allocataires. » Sans compter qu’il advient fréquemment qu’un voisin indélicat cafte auprès de l’institution.
« Souvent, c’est la panique », quand on n’est pas préparé à cette intrusion dans sa vie privée. Les CAFards donnent donc force conseils et éléments de droit utiles en pareille occasion. En cas de visite surprise, par exemple, il est tout à fait légal de refuser « l’accès et le contrôle à l’improviste, et de demander un autre rendez-vous ». Par ailleurs, s’il est vrai que « le contrôleur a le droit de demander des relevés de compte bancaire », l’allocataire a toute liberté de ne pas « montrer ses débits » !
Ce précieux document comporte moult témoignages d’allocataires ayant subi le passage de ces importuns. Et c’est instructif : « Lors du contrôle, je me rends bien compte qu’il veut prouver que j’habite avec le père de ma fille, alors que je déclare habiter seule avec elle. […] Malgré les trois heures “d’interrogatoire”, sans aveu de ma part, le contrôleur n’a rien pu prouver. » Surtout, ne jamais avouer !
Il en ressort que la meilleure défense, c’est encore le collectif. Et l’occasion d’organiser un petit dîner de cons à domicile… « Le jour du rendez-vous, nous sommes une dizaine dans la maison. Nous l’installons [le contrôleur de la CAF, ndlr] à une table dans le salon. Certains s’asseyent à la table, d’autres un peu plus loin sur le canapé. Avant même que ne s’estompe son premier sentiment de surprise, nous lui posons toute une série de questions sur ses objectifs réels. […] Bref, il comprend que nous sommes aussi là pour “contrôler” ce qu’il fait. […] Au final […], il ne prend finalement que quelques minutes pour vérifier mon numéro de Sécu qui était, selon lui, le seul objet de son passage au domicile. » Ciao, monsieur, au plaisir de ne jamais vous revoir !
Contact : cafardsdemontreuil@riseup.net. Cette brochure est téléchargeable sur https://cafard93.wordpress.com ainsi que sur www.cip-idf.org.