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Code du travail

En attendant la broyeuse


paru dans CQFD n°157 (septembre 2017), rubrique , par Sébastien Navarro
mis en ligne le 12/02/2018 - commentaires

Le 31 août, le tandem Philippe-Pénicaud rendait public le contenu des fameuses ordonnances réformant – encore ! – le droit du travail.

JPEGFin d’un terrible suspens estival et florilège d’une casse éminemment sociale. Quelques jours avant la présentation des ordonnances, Muriel Pénicaud, ex-DRH chez Danone et actuelle ministre du Travail, tentait d’expliquer sa démarche : «  Un pays, c’est très différent de l’entreprise, ça ne se gère pas de la même façon [1]. » Marrant ce que dévoile en creux ce genre de coming out. La caste des politiques ? Une armée de managers. La France ? Un machin à juter du dividende. Dans les soutes, un précariat toujours plus massif et protéiforme. On l’aura compris : lutter contre le chômage implique de permettre au patronat de pouvoir tailler toujours plus vite et plus fort dans le gras de la masse salariale. Mieux virer pour mieux embaucher : la Macronie jupitérienne poursuit sans ambages l’inoxydable programme de casse du droit du travail. Après les coups de hache de Loi El Khomri en 2016, ce dernier se mange une attaque à la disqueuse avec les 36 mesures sur ordonnance. Objectif des prémisses de cette « révolution copernicienne » : redonner un peu d’air à un patronat régulièrement rançonné par la voyoucratie syndicale. Désormais, les indemnités prud’homales sont plafonnées. Finis les parachutes dorés alloués aux salariés injustement lourdés : une « barémisation » est mise en place, qui indexera les indemnités de licenciement sur l’ancienneté de l’ex-travailleur. Dans le même élan, le délai de recours aux prud’hommes est raboté de moitié. À un an de la quille, le Gattaz des patrons a de quoi faire le fiérot : v’là un vieux vœu du Medef enfin exaucé.

Du côté des petites entreprises, on est aussi à la fête. Comme la plupart des boîtes de moins de 20 salariés n’ont pas de délégués syndicaux, la liberté de manœuvre des tauliers était affreusement corsetée par les accords de branche. Les énergies sont à présent libérées, puisque les petits patrons pourront convoquer directement leurs salariés et soumettre à leur suffrage de nouvelles directives de travail. De quoi griser Alain Grisé, porte-flingue de l’U2P [2], qui a applaudi cette « possibilité pour les entreprises de déroger aux règles de branches en fonction de leurs besoins et de leurs priorités ». On n’oublie pas les multinationales, qui auront le droit d’éjecter leurs salariés surnuméraires sans qu’on tienne compte de leur situation financière mondiale – seuls leurs résultats nationaux importeront. « Cette réduction du périmètre rend possible la mise en faillite d’une unité implantée en France alors que la santé du groupe est florissante à l’échelle mondiale », analyse perfidement L’Humanité dans son édition du 1er septembre.

«  Au final, nous sommes déçus », larmiche le jaune Berger, chef de clique à la CFDT. En grand cocu du dialogue social, le chantre de la cogestion appelle ses troupes à bouder les grosses manifs du 12. Idem pour Mailly : le boss de FO est allé jusqu’à traiter de «  grognons râleurs » celles et ceux de ses adhérents qui souhaiteraient prendre la roue de la Cégète et autre galaxie insoumise. Et pour nous ? Soyons tactiques. On est certes tout à fait en droit de rester sceptique face à ces grandes convocations de rue, mais on n’aurait vraiment rien à gagner à laisser un boulevard aux radicalisés de la casse sociale.


Notes


[1Le Monde du 27/08/2017.

[2Union des entreprises de proximité (artisans, commerçants et professions libérales).



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Par Sébastien Navarro


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