Édito-sommaire

Au sommaire du n°140 : spécial Turquie

En kiosque à partir du vendredi 05 février 2016.
En une : "La sale guerre d’Erdogan" de Magali Dulain.
Un article sera mis en ligne, chaque semaine. Les autres articles seront archivés sur notre site trois mois plus tard. D’ici-là, tu as tout le temps d’aller saluer ton kiosquier ou de t’abonner...
CQFD parle dans le poste radio au cours de l’émission "Presse Libérée" tous les deuxièmes mardis du mois de 11h30 à 13h en direct sur Radio Galère, rediffusé tous les deuxièmes vendredis du mois de 12h30 à 14h sur Radio Zinzine..
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Édito : Et « socialiste » devint une insulte

A Septèmes-les-Vallons (Bouches-du-Rhône), Nacer a été assigné à résidence pendant trois semaines sur un « malentendu ». Véolia, avec qui il est en conflit après avoir travaillé dans une station d’épuration, l’a signalé aux services de police, le jugeant susceptible de vouloir empoisonner le réseau d’eau potable. En guise d’indice, les flics découvriront dans son ordi une recherche sur des produits chimiques avec lesquels il avait été en contact, qui l’avaient rendu malade et dont la Sécu lui réclamait la liste. Lors d’une perquisition musclée au domicile du suspect – armes au poing, casques, boucliers, porte enfoncée, enfants traumatisés,etc. –, les agents ont demandé à sa femme qui était le barbu accroché au mur du salon : il s’agissait d’un auto-portrait de Léonard de Vinci…

C’est ce genre d’histoire à la Brazil, et d’autres encore moins drôles, que la guerre au terrorisme et les bidouillages constitutionnels vont finir par rendre « normale ». « Il y a un effet de sidération suite aux attentats, mais cet effet s’estompe avec le temps, constate Charlotte Girard, du Centre de recherche et d’études sur les droits fondamentaux, dans Libération (25/01). L’absence de résistance est liée à d’autres raisons, notamment à une nouvelle hégémonie culturelle. En prolongeant un état d’exception, on habitue les gens à un autre état des rapports sociaux et institutionnels. Cette accoutumance finit par créer une autre culture. Elle ajoute : En figeant l’hypothèse de l’exception dans l’ordre juridique, le projet de constitutionnaliser l’état d’urgence apparaît donc particulièrement dangereux. »

Dangereux, oui. Le Pen, Sarkozy, Valls… Il ne manque ici qu’un Donald Trump pour une partie de poker-menteur jouant avec le feu de la guerre civile. Pendant ce temps, ce claque-socialiste de Macron peut déclarer que « la vie d’un entrepreneur est plus dure que celle d’un salarié » – et le même jour, on apprend que deux saisonniers sont morts empoisonnés au monoxyde de carbone produit par le chauffage défectueux du van où ils logeaient, sur le parking d’une station de sports d’hiver. Pendant ce temps, ce peigne-socialiste de Badinter met son prestige d’humaniste au service d’un énième équarrissage du Code du travail. Pendant ce temps, Hollande, ce socialiste de bidet, vend des Rafale à l’Inde – et pourquoi pas à l’Iran, après en avoir fourgué à l’Arabie saoudite. Sacrés socialistes.

Le dossier Turquie : Réfugiés, conflit kurde, autoritarisme…

La sale guerre d’Erdogan

« La Turquie et la France sont d’accord sur tous les points de discussions, y compris le terrorisme », déclarait le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, en visite chez le calife Erdogan, le 5 janvier dernier. Mi-décembre, en plein début d’offensive contre plusieurs villes kurdes du Sud-Est anatolien, l’Union européenne se félicitait de la reprise des pourparlers pour l’entrée de la Turquie en Europe. Ces jeux de dupes et petits arrangements diplomatiques habituels voudraient nous masquer les collusions à plusieurs niveaux du pouvoir ottoman avec Daech et sa responsabilité dans la reprise des hostilités contre la population kurde – tout cela sur fond de chantage à la politique migratoire que l’Europe sous-traite à Ankara avec le renfort de milliards d’euros. « Chaque centime qui est donné par l’Union européenne à l’État turc retombe sur les Kurdes sous la forme de bombes et de balles », estimait Yunus un militant kurde d’Istanbul.

Au-delà des affres de la realpolitik française et européenne, le climat d’intimidation et de guerre civile qui sévit actuellement en Turquie nous concerne à plus d’un titre : crise des réfugiés, guerre sans nom et sans fin contre le « terrorisme », interventions des grandes puissances au Moyen-Orient. Le durcissement du champ politique turc n’est pas étranger aux raidissements que nous vivons sous des formes plus sournoises dans l’Hexagone. Il y a un siècle, la guerre mondiale ouvrait la voie aux régimes totalitaires… L’antiterrorisme a-t-il ouvert une nouvelle ère des tyrannies ?

« Il existe une triste chaîne de violences d’État depuis 1915 » > Étienne Copeaux est historien et animateur du blog susam-sokak. Il examine l’escalade actuelle de la violence en regard du contexte tourmenté de la Turquie contemporaine. Entretien.

Istanbul : Gazi, quartier rouge > La guerre menée dans l’Est de la Turquie touche peu à peu Istanbul et en particulier le quartier pauvre de Gazi, refuge de nombreuses organisations révolutionnaires kurdes et turques. La mort, le 23 décembre, de deux militantes d’extrême gauche, abattues par la police dans l’appartement où elles se cachaient, n’a fait que renforcer la crainte d’une nouvelle explosion de violence dans la métropole.

Avec Amed la rebelle > Nos copains du blog Ne var Ne Yok, qui animent « des chroniques du Kurdistan, du Rojava et de Turquie », se trouvaient du 8 au 22 décembre à Diyarbakir (Amed en kurde), capitale des régions kurdes du sud-est anatolien, pendant les opérations de châtiment collectif infligées par l’État central turc aux populations kurdes. Récit d’une lutte pour l’autodéfense et l’autonomie au quotidien.

«  Loin des yeux, loin du cœur  » > « La crise dont nous sommes tous témoins est un test de notre humanité et de notre responsabilité », affirmait Donald Tusk, le président du Conseil européen face à ce que l’on considère comme la plus grave « crise migratoire » depuis la Seconde Guerre mondiale. Pour y répondre, l’Europe responsable a choisi la… sous-traitance, confiée à la Turquie, tandis que les corps des réfugiés s’échouent toujours par centaines sur les côtes des îles grecques. Reportage.

Les travailleurs du cuir d’Izmir : De la xénophobie à la lutte des classes > Dans un petit atelier du quartier de Basmane, « petite Syrie » d’Izmir, une machine à coudre cherche sa place parmi les chutes de cuir. Son conducteur, Yalçin, est membre de l’Association de solidarité et coopération culturelle pour les Africains (Afrötürc) qui mène des recherches sur l’origine de la petite minorité afro-turque en Turquie. Leurs ancêtres sont arrivés en tant qu’esclaves dès le XVIII e siècle, ramenés du pèlerinage de La Mecque par des familles ottomanes, ou envoyés, en 1856, depuis l’Égypte ou le Soudan, pour construire le premier chemin de fer de Turquie. Mais Yalçin interrompt son travail pour raconter une autre histoire : celle des travailleurs du textile et du cuir de mai 2013.

Par Ismail Kizil Dogan.

Enquêtes et reportages

Hiver chaud bouillant sur la ZAD : L’assemblée des salamandres > Taper au portefeuille des derniers paysans de Notre-Dame-des-Landes qui refusent de partir n’a pas marché. Et face aux menaces d’expulsions, la résistance fourbit son sens de l’autodéfense.

Projets miniers : L’Hexagone à la foreuse > Depuis 2012, on ne compte plus les projets d’extraction minière en France. Liftée façon greenwashing, la mine dite « responsable » n’aurait plus rien à voir avec un sombre tableau à la Émile Zola. Petit tour d’horizon de cette nouvelle fièvre qui promet de désastreux coups de grisou.

Prolos > Goodyear : et surtout, la Santé ! > Séquestrer sa direction lors d’un conflit social ? Ben oui, cela fait partie du rapport de forces. Cela ne semble pas évident pour la justice qui vient de condamner à de la prison ferme huit ex-salariés de Goodyear.

École : La culture du confinement > C’est la guerre et il faut y préparer les enfants. Après les attentats du 13 novembre, des exercices de « mise en sûreté » ont été programmés dans les écoles. Attention, risque majeur pour les mineurs !

Aperçus d’un périple à travers la Cisjordanie : Noël en Palestine > Du 20 décembre 2015 au 5 janvier 2016, Pierre Stambul, militant de l’Union juive française pour la paix (UJFP), a sillonné la Cisjordanie, mais aussi Israël, à la rencontre des Palestiniens et de militants anticolonialistes. Morceaux choisis d’un récit de voyage édifiant.

Ma cabane pas au Canada : Pour que le Lieu-Dit vive > C’est dans l’adversité qu’on reconnaît ses amis, paraît-il. Depuis l’annonce d’une menace de fermeture pour raisons économiques, le Lieu-Dit, bar-restaurant de Ménilmontant et espace pluriel de réunions politiques, a su susciter une vague de solidarité remarquable en ces temps propices au repli.

Cultures et analyses

Théâtre : Toutes des reines > Dans les loges étroites, l’excitation est à son comble. Ça piaille, on piétine plumes, bas et artifices. « Bé, tu t’es maquillée pour Aix ! » Les filles entrent en scène dans une demi-heure, on ne mâche plus ses mots. On ne peut s’empêcher de penser aux métiers qu’elles exercent dans la vraie vie. Relâchement. On écarte les jambes, genoux fléchis, un dernier cri, mains à plat sur les aines, comme un haka de rugbymen. Les femmes sont prêtes.

Mais qu’est-ce qu’on va faire du citoyen-soldat 2.0 ? > Pour le marteau, tous les problèmes ressemblent à un clou. Pas étonnant que pour Bernard Wicht , spécialiste marteau des questions stratégiques et militaires à l’université de Lausanne, tous les problèmes ressemblent, donc, à un flingue… ou plutôt à l’absence de flingue.

Bouquin : C. L. R. James, un radical noir > Avec l’ouvrage C. L. R. James – La vie révolutionnaire d’un « Platon noir », paru aux éditions La Découverte, Matthieu Renault nous invite à découvrir le parcours et l’œuvre de cet historien et anticolonialiste caribéen, marxiste hétérodoxe, quasiment inconnu en France.

Docu : Paris, ville du capital > Dans l’arrière-salle d’un ciné non commercial, avec le réalisateur de Paris grand capital, François Lathuillière. On commence par l’embourgeoisement de la petite couronne parisienne. On termine en dépassant la « quartiérisation » de la critique.

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