« Ils entrent de façon irrégulière et agressive »

À Ceuta, la criminalisation des migrant.e.s

Alors que la dérive de l’Aquarius venait de trouver un havre d’humanité dans le port de Valence, l’État espagnol a tenu à lancer un signal de fermeté à son opinion publique.
La couverture du n°168 de « CQFD », illustrée par Vincent Croguennec.

En contre-feu aux invectives de l’opposition qui brandissait la menace d’un effet « appel d’air », la vice-présidente Carmen Calvo déclarait après un passage collectif de la frontière de Ceuta, au nord du Maroc, le 26 juillet : «  Ils ont pris d’assaut la frontière. Ils sont entrés avec des instruments et des substances avec lesquels ils ont blessé plusieurs membres de la Guardia civil. Et nous n’allons pas tolérer cela.  »

Ces «  instruments » seraient des armes blanches. Ces « substances », des excréments, de la chaux vive ou de l’acide. C’est aussi la violence supposée des « assaillants » de la triple grille de barbelés qui a permis l’expulsion immédiate de 116 autres migrants, le 23 août. Sans autre forme de procès. Sans vérifier si parmi eux se trouvaient des mineurs ou des personnes relevant du droit d’asile. Pour cela, les autorités locales ont dépoussiéré un accord bilatéral, datant de 1992, qui autorise le renvoi de citoyens de pays tiers vers le Maroc – accord inique ayant inspiré des arrangements plus récents de l’Union européenne avec la Turquie ou la Libye. Pour justifier une telle violation du droit, la police a arrêté dix Subsahariens, accusés par des témoignages sous X d’avoir porté des coups aux gardes-frontières et d’être les chefs d’une « organisation ». Les inculpés clament leur innocence et pointent un racisme institutionnel.

Cette criminalisation des candidats à l’exil vient légitimer a posteriori la guerre menée contre eux. Rendra-t-elle présentables les quinze morts par noyade du 6 février 2014 sur la plage du Tarajal, quand la Guardia civil avait tiré balles en caoutchouc et gaz lacrymogène sur un groupe de nageurs tentant d’atteindre le sol espagnol ? En attendant, le Maroc vient d’obtenir 130 millions d’euros de Bruxelles pour gérer d’une main de fer la frontière extérieure.

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