Les flics n’ont pas d’humour
« L’attention du Breton se promena le long du zinc, dénombrant leurs amis dont Panaf, un Pyrénéen trapu, riant peu mais faisant rire avec de ces réparties… Un après-midi de rafle dans un troquet de la place Blanche, alors que les perdreaux s’inquiétaient de la profession des arsouilles pour s’entendre répliquer à chaque fois “représentant”, et qu’écoeurés, ils s’étaient immobilisés devant Panaf, en lançant la même question : “- Et toi, qu’est-ce que tu fais ? – Le désespoir de mes parents”, leur avait renvoyé le Pyrénéen, impavide. Ceux de la maison Parapluie en avaient dégluti de travers ; pas leur chef. Lui avait braillé. “Hop ! Embarquez-moi ce comique !” »
Auguste Le Breton, 2 sous d’amour, Vertiges, 1986.
Libre, et au pas
« Dans les monarchies arbitraires où le despote régnant peut dire à ses malheureux sujets : “Mangez de la paille”, et où ils mangent de la paille, il n’est pas étonnant que l’on puisse lever des armées de bouchers humains pour détruire leurs congénères. Mais dans un pays comme la Grande-Bretagne, qui au moins se prétend libre, il est vraiment surprenant que tant de milliers d’hommes renoncent délibérément aux privilèges et aux bienfaits propres aux hommes libres, et choisissent de se vendre à l’esclavage le plus humiliant et le plus dégradant, pour la pitance misérable de six pences par jour. »
Lettres sur l’absurdité de lever une armée en temps de paix, et sur la mesure inconstitutionnelle et illégale de Barracks, 1793. Pamphlet anonyme. In E.P. Thompson, La Formation de la classe ouvrière anglaise, Gallimard Le Seuil, 1988.
Ça va tomber
« Qu’il était exquis le bon sens de ce pirate qui répondit à Alexandre : “On m’appelle brigand parce que je n’ai qu’un navire, et toi, parce que tu as une flotte, on t’appelle conquérant !” Avec quelle impudeur ils font des lois contre le vol, lorsqu’ils envahissent la fortune publique ! On condamne en leur nom les assassins, et ils assassinent des millions d’hommes par la guerre et par la misère. »
Maximilien Robespierre, Discours à la tribune de la Convention, le 18 floréal an II. In Buchez et Roux, Histoire parlementaire de la Révolution française, 1837.
Dictature du Daubé
« Imaginez un pays qui n’aurait qu’un seul quotidien […]. Imaginez que ce journal, en plus de disposer d’un monopole de fait de l’information écrite, soit le partenaire affiché de l’État, de toutes les instances de pouvoir, des centres de recherche scientifique, des banques et des quarante premières entreprises cotées en bourse. […] Si c’était le cas, ce pays serait considéré comme potentiellement totalitaire. […] On parlerait de dictature ou bien de démocratie malade. […] Mais ce qui est scandaleux pour presque tout le monde à un niveau national ne l’est plus à l’échelon local. Personne ou presque ne s’étonne du pouvoir dont dispose Le Dauphiné Libéré dans notre région. »
Le Postillon, Pourquoi le Daubé est-il daubé ? – Histoire critique du Dauphiné Libéré, éditions Le Monde à l’envers, 2010.