Brèves du 96

Nucléocrate impartial > Michèle Rivasi, fondatrice de la Criirad – et aujourd’hui députée européenne d’Europe écologie – est vraiment de mauvaise foi. Après avoir pointé du doigt les mensonges de l’État français lors de l’explosion de Tchernobyl en 1986, la voilà qui s’indigne à propos de l’enquête publique – procédure dont la validité démocratique n’est plus à démontrer – sur le démantèlement de l’usine d’enrichissement de l’uranium de Tricastin : un des trois commissaires chargé de l’enquête publique était le patron d’une entreprise travaillant avec ce même site nucléaire ! « Conflit d’intérêts ! » crie la Rivasi. « Ce n’est pas vrai ! Philippe Beaudoin [l’inspecteur incriminé] est à la retraite depuis douze ans ! », brame le préfet de la Drôme. C’est vrai, quoi ! N’est-il pas de notoriété publique que les retombées du nucléaire sont de courte durée ?

Provocation électorale > À CQFD, nous avons reçu les vœux à la presse de François Bayrou (Modem) et d’Éva Joly (Europe écologie – Les Verts). Heu… On se connaît ?

Minable Copé > « Tu comprends, si on n’a [à l’Assemblée nationale] que des gens qui se contentent de 5000 euros par mois, on n’aura que des minables. » Les auteurs de L’Oligarchie des incapables (Albin Michel) attribuent cette déclaration à Jean-François Copé, secrétaire général de l’UMP. Avec 5 000 euros mensuels, tu es un minable. Mais alors… Quel petit nom nous réserve-t-il, Copé, quand on survit avec le RSA ?

Zour, les petits zenfants ! > Le 6 janvier, l’acrobate Sarkozy a d’une main prié dans la chapelle du village natal de Jeanne d’Arc tout en chantant les vertus de la taxation des transactions financières de l’autre. À l’approche du cirque électoral, le public émerveillé peut s’attendre à toutes les acrobaties burlesques. Voici deux ou trois modestes propositions susceptibles de rapporter quelques bulletins supplémentaires aux candidats : passer une nuit sur un campement de Roms et une autre dans un commissariat ; promouvoir l’autogestion avant de se faire acclamer par l’assemblée des actionnaires de Total ; honnir l’immigration clandestine et se faire photographier en train de sécher les yeux d’un enfant dont le père est en centre de rétention, etc. Côté citoyen-spectateur, on peut déjà faire péter le pop-corn et battre des mains.

Con comme un slogan > Le 8 janvier, François Hollande et sa clique socialiste s’en sont allés sur les terres de leur ancêtre. Le vieux François Mitterrand, se faisant bouffer par les vers à Jarnac, a eu l’occasion de voir débarquer tout un cirque devant sa tombe. Invité par la presse à décliner les enseignements de son maître, seul socialiste à avoir réussi l’ascension du Saint des Saints de la technocratie nationale, Hollande répond de façon lacunaire : « Mitterrand, c’est la “force tranquille” » (slogan de 1981). Devant ce vide sidéral, nous souhaitons à sa « force tranquille » de « présider autrement » (slogan de Lionel Jospin en 2002) son « changement » (slogan de 2012).

Mort-fourgon > Wissam El-Yamni est mort à l’hosto dans la nuit du lundi 10 janvier, dix jours après son interpellation musclée dans un quartier populaire de Clermont-Ferrand quadrillé par les forces de l’ordre le soir de la St-Sylvestre. Plaqué au sol puis enfourné dans le fourgon, Wissam en ressort dans un état de coma avancé, présentant de multiples fractures ainsi que des lésions au cou. Encore « l’effet clé d’étranglement et écrasement de la cage thoracique » pratiqué avec zèle par nos courageux pandores ?

Ça s’arrose > Le parquet avait fait appel après la relaxe de Xavier Mathieu, leader CGT des Conti, qui avait refusé de se soumettre à un prélèvement d’ADN. Rejugé devant la cour d’appel d’Amiens le 4 janvier, le gars s’est permis ces remarques désobligeantes : « Agir dans la désobéissance civile est pour moi une nécessité et un acte de résistance vital. » Ou encore : « La seule véritable identité française que je reconnaisse : notre tradition révolutionnaire, ce formidable pouvoir de résistance exercé par nos aïeux lors de la commune de 1871… » Pour conclure par : « Mon ADN m’appartient, il m’a été transmis par mes parents et je l’ai transmis à mes enfants. Jamais je ne donnerai mon ADN autrement que par amour. » Espérons que tout ça ne rende pas trop amer le champagne de Sarkozy et des deux syndicalistes de salon, Thibault et Chérèque, qui roteront de concert à l’Élysée lors du « sommet social » du 18 janvier.

« Vous avez un message » > Les architectes du nouveau siège de la banque Nykrédit (en un seul mot), une des plus grandes banques hypothécaires danoises, n’ont pas lésiné sur le concept. Dans ce bâtiment, les designers se sont appliqués à créer des salles de réunions aux dimensions donnant un sentiment d’immensité face à des hommes réduits à une taille ridicule. Petit plus : ces espaces où se décident les open market activity et les bank operating and strategic business semblent suspendus dans le vide. Une somme d’allégorie qui laisse à penser qu’il y a finalement quelque chose de lucide au royaume du Danemark.

Révisionnisme latino > Les étudiants chiliens, dans la rue depuis avril 2011, ont réussi à avoir la peau de deux ministres de l’Éducation en moins d’un an. Le nouveau titulaire du poste, un certain Harald Beyer, semble avoir bien saisi l’ampleur de la contestation puisqu’il vient de décider de supprimer la mention « dictature » pour qualifier le règne de Pinochet dans les manuels scolaires. C’est sûr, « régime militaire », c’est tout de suite plus présentable !

La java des chaussettes à clou > L’avenir semble de mieux en mieux assuré pour Alain Bauer. Claude Guéant vient de le doter d’un nouveau joujou sécuritaire en le nommant à la tête d’un Conseil national des activités privées de sécurité, chargé de contrôler le secteur des boîtes de sécurité privées, secteur en plein expansion grâce notamment à la loi Loppsi 2 qui augmente considérablement les prérogatives de ces milices. Selon Guéant, il s’agit d’écarter tout risque de « dérives sur le plan des libertés individuelles ». Et pour cela, on peut faire confiance au multirécidiviste Bauer, lui-même donneur de conseil en sécurité privé et public, formateur de la police chinoise, titulaire d’un « Big brother award » en 2003, un des instigateurs de l’affaire Tarnac, etc., etc.

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Paru dans CQFD n°96 (janvier 2012)
Par L’équipe de CQFD
Mis en ligne le 16.01.2012