Peur sur l’école : « C’est un avertissement »

Dans la presse, le collège est présenté comme un lieu de violence, les maternelles comme des cibles. Illustration avec Le Parisien et l’assurance OME de la MAIF.

Le saviez-vous ? La France avait peur avant les attentats du 13 novembre 2015, notamment grâce à la savante mise en scène du Parisien. Dans son édition du 12 octobre, il nous informe que les enseignants souscrivent de plus en plus « une assurance particulière » contre les violences faites aux hussards noirs de la République. «  Insultes, menaces, plus d’un professeur sur deux s’assure contre les agressions. » Diffamation, réputation mise à mal sur Facebook, etc., désormais il y a une garantie contre tout ça !

Ainsi, la MAIF, assurance majoritaire chez les personnels de l’Éducation nationale, propose le contrat OME (Offre Métiers de l’Éducation) pour deux euros par mois. C’est cool la MAIF et comme c’est mon assurance, on est sympa avec moi, j’ai rapidement la personne citée dans l’article du Parisien. En écoutant mon interlocuteur, on comprend rapidement l’enflure médiatique du propos. « Il y a vingt ans, on considérait l’école comme un lieu de paix », m’explique Gary Ménaudau. Rackets, bandes, tout cela était dénoncé par les mêmes apôtres de la sécurité avant que les établissements scolaires ne soient un concentré de violence, un péril jeune. Le sanctuaire de l’école est une fausse idée. Pourquoi l’école serait hors de la société et de la famille ? Comment la violence ou la misère familiale pourrait-elle rester à la porte de l’école ?

Si le papier du Parisien cite la Seine-Saint-Denis, taux de pauvreté supérieure à 20 %, c’est que l’on y envoie souvent les enseignants pour leur premier poste. Leur profil ? Très jeunes, provinciaux et naïfs. Arrivés là, ils sont confrontés aux « affreux, sales et méchants » du regretté Ettore Scola, secondés par les relégués de « l’apartheid social » du regrettable Valls et renforcés par les « barbares » djihadistes de Hollande, remplissant toutes les tours, à Aulnay comme à Saint-Denis.

L’assurance OME : « Tous la voient comme l’arme de défense indispensable des enseignants attaqués par un élève ou un parent », annonce fièrement Le Parisien. Le vocabulaire guerrier est évidemment outrancier dans ces propos, mais c’est désormais la mode dans les médias que de détruire patiemment l‘école publique en la décrivant comme le lieu privilégié de la violence1. Gilles Balbastre a remonté le fil des événements médiatiques en interrogeant les enseignants d’un collège classé en éducation prioritaire, où une élève s’est suicidée en 2012. Mensonges, montages et récits cousus de fil blanc avec interviews au ras du trottoir furent le quotidien médiatique de cette affaire.

La moitié des professeurs ne souscrit donc pas à cette offre pour ce que veut nous vendre Le Parisien, mais parce qu’elle est une offre globale. « La révélation » du journal prolonge l’éventail de la propagande sécuritaire des médias. Et fournit en prime une défiance envers un État qui ne défend évidemment pas ses ouailles contre les parents d’élèves agressifs et leurs mômes dégénérés. Les parents flippés se tournent vers le privé, réputé plus encadré et surtout exempt de mouvements de grève. Mais l’assurance « sans grève » n’existe pas encore. Ce sera bientôt au programme des socialistes, sans doute.

Le 14 décembre 2015, rebelote, les doutes du Parisien sont confirmés par un fait divers dans une école maternelle. Un enseignant y a été la victime d’un agresseur armé d’un cutter, au cri de : « C’est Daech, cela ne fait que commencer, c’est un avertissement. » Les journaux ont alors expliqué que Daech en voulait aux enseignants, fatwatisés « ennemis d’Allah ». La ministre de l’Éducation s’est empressée de prendre des mesures avant même que l’enquête ne soit bouclée. Dans le même temps, la nouvelle patronne de l’Ile-de-France, Valérie Pécresse, annonce qu’elle va débloquer des fonds pour sécuriser les lycées. Priorité absolue pour éviter les intrusions dans les établissements. Des sanctuaires doivent naître partout. Le mensonge est démonté le lendemain après interrogatoire de l’enseignant qui a tout inventé. Un peu comme Le Parisien.


1 Voir le film de Gilles Balbastre, Un cas d’école. Nada productions. 2015

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