Noise électrique pour France périphérique

Ils portent les doux noms de Pneu, Marylin Rambo ou France Sauvage et viennent respectivement de Tours, de Lozère, ou de Rennes. On peut les voir suer sur leurs instruments et défoncer les tympans de leur public dans les caves de bars, quelques squats ou au fin fond du Massif central.

Cette scène que certains qualifient de « noise » – même si chaque groupe se donne des pseudo-étiquettes improbables comme tropico-noise, archaïc plounk ou zombie lo-fi – explose dans toute l’Europe depuis quelques années. Pour Pascal, qui officie dans les Louise Mitchels et Besoin Dead (groupes de Seine-Saint-Denis), « on se retrouve dans l’idée de faire les choses par nous-mêmes, de la façon la plus indépendante possible mais avec de la qualité car on associe souvent la musique militante et Do-it-yourself à un son merdique ! » Militante, faut pas pousser, ce qui compte c’est surtout le local, la rencontre avec le public et les histoires d’amitiés. Néanmoins certaines pistes des Louise commencent avec des extraits de La Société du spectacle de Guy Debord et le groupe joue en soutien de copains inculpés comme « anarcho-autonomes ».

Le phénomène embrase l’Hexagone. à Montpellier, Dure-Mère s’essaie, avec d’autres, au tango-noise tandis qu’à Metz le Singe Blanc fait dans le dark zouk et que dans l’Aveyron, Parpaing propose de la noise acrobatique. « Il se passe vraiment quelque chose en France, ajoute Pascal, où il y a des groupes très différents et des labels avec une vraie patte comme les Potagers Natures à Bordeaux. Ça se passe surtout à la campagne ou dans les villes moyennes, avec un lieu fixe, où des zicos et des tas de gens différents comme des dessinateurs ou juste des fanas de musique traînent tous ensemble, des espaces qu’on ne retrouve plus à Paris tant la politique urbaine est agressive ». En témoigne les collectifs comme Le Dernier Cri ou Arrache-toi un oeil d’où émanent fanzines, affiches et pochettes de vinyles qui montrent leurs fesses à la dématérialisation de la musique. Le groupe Headwar, inénarrables vaudous punks d’Amiens, font même leur propre pochette, enregistrent des chiens qui aboient sur un slow ou des concours de larsen.

« Quelques-uns bossent mais pas mal vivotent au RSA et jouent à côté : il y a l’envie d’expérimenter, avec toujours de la débrouille et du système D, énormément de collaboration et de savoir-faire et surtout toujours de la musique gratos en téléchargement libre et des vinyles à pas chers ! », renchérit Pascal. Et comme l’annonce le label Mon cul c’est du tofu, créé il y a trois ans à l’initiative de banlieusards parisiens : « Nous voulons continuer à faire ce que nous aimons, c’est-à-dire proposer une alternative à la production dominante de la musique. […] Nous n’avons pas de distributeur, de manager, de booker, et nous n’en voulons pas, n’en cherchons pas. […] Vous pouvez aussi nous contacter pour n’importe quelle raison. Nous sommes un tout petit peu plus intelligents que nous en avons l’air. »

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