Ça brûle

La lumière au bout du local

Où la lumière s’abat sur notre rédaction...

« Et puis j’ai vu de la lumière alors je suis sorti / Et j’ai dit / Bonne idée » (Jean-Jacques Goldman)

C’est de notoriété publique : le local de CQFD souffre d’un gros déficit de lumière, et pas seulement dans les cervelles qui y rôdent. Situé au rez-de-chaussée, il n’est doté que de deux soupiraux sur cour à la Schtroumpf et d’une vitrine en façade orientée nord-nord-ouest et aménagée à la manière d’une mercerie abandonnée de la banlieue d’une ville moyenne d’ex-Allemagne de l’Est. Pas exactement la galerie des Glaces du foutu château de Versailles. D’où les sobriquets qui meurtrissaient jusqu’à présent la réputation du lieu : « la grotte aux taupes », « le trou des morts-vivants », « la mine à charbon hantée »... D’où aussi les hypothèses des toubibs attribuant notre neurasthénie chronique à une carence permanente en vitamine D. Un comble, sous l’astre endiablé qui brûle notre métropole méridionale en voie de gentrification accélérée.

Rien de nouveau sous le soleil ? Si ! Saisi de frénésie (et d’une obligation de ravalement), le proprio a vu les choses en grand. Après des semaines d’hibernation à l’ombre d’un échafaudage, quelques jours à enjamber les gravats et autant de nuits à garder le local béant, fusil à la main… Tadaam ! Elle était là, la vitrine flambant neuve. Les premiers temps, on ne retrouvait plus la porte, c’était trop beau, on se croyait chez Sephora. Merveille. Puis la gênance en redécouvrant nos camarades de taf : « C’est donc à ça que tu ressembles en vrai ? Mais c’est horrible ! »

Forts de ce bouleversement luminescent, nous abordons l’avenir avec l’enthousiasme de canassons sous taz’ galopant dans le soleil couchant camarguais. Vivre comme des diamants dans le ciel, telle sera désormais notre devise. Notre nouveau site, vitrine du journal, que ne consultent pour l’instant, et par erreur, que deux pelés et trois tondus ? C’est un début, la lumière viendra. Le départ de camarades essentiels au fonctionnement du journal – le sang, quoi – à la rentrée prochaine ? D’autres pépites s’échoueront bientôt sur nos rives, avec qui nous voguerons droit sur le phare de la révolution brinquebalante. L’actualité semée de soleils noirs flippants ? On va gérer.

Méthode Coué ? Pas notre genre. À l’heure du bouclage, nos yeux harassés se rassérènent devant le spectacle enfin visible de la rue Consolat. Et à voir tous ces passants se presser vers l’apéro, un truc est sûr : une fois le canard envoyé à l’impression, on va fissa prendre exemple sur eux. Car ce journal est comme un papillon de nuit : là où il y a de la lumière, il fonce rejoindre ses potes. D’ailleurs on en cherche, des potes. Avis, donc, à toi Marseillais·e sniper·euse de coquilles, à la plume acérée et amateur·ice de débats enflammés : viens, on est bien ! ■

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Cet article a été publié dans

CQFD n°210 (juin 2022)

Dans ce numéro de juin criant son besoin « d’air », un dossier sur la machine répressive hexagonale et les élans militants permettant de ne pas s’y noyer et d’envisager d’autres horizons. Mais aussi : un long reportage à Laâyoune, Sahara Occidental, où les candidats à la traversée pour les Canaries sont traqués par les flics marocains, une visite dans la Zone À Patates (ZAP) de Pertuis, un dialogue sur les blessures de la guerre d’Algérie, de la boxe autonome, une guérilla maoïste indienne, des Trous orgasmiques…

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