Muriel Gilbert, elle, les possède. Correctrice au Monde, elle a publié en 2017 Au Bonheur des fautes (éditions La Librairie Vuibert), où elle narre son quotidien professionnel au sein du journal balladurien. Mais le principal intérêt de l’ouvrage est ailleurs, dans les règles de français qu’elle y égraine.
Quelques-unes, relevées au fil de la lecture, valent d’être rappelées ici. Comme cette petite phrase qui évite un circonflexe (les pros disent « flexe ») intempestif, et l’oblige par ailleurs : « L’accent sur le i de cime est tombé dans l’abîme. » Trop connue ? une autre. Muriel Gilbert rappelle que « le verbe “ bayer ” ne s’emploie que d’une façon : […] dans l’expression “ bayer aux corneilles ”, qui signifie “ rêvasser ” ». À ne pas confondre avec bâiller, les fatigués !
Et celle-ci, qui nous tient à cœur, car très répandue dans la presse : la signification de l’adjectif « éponyme » n’est pas – du tout – « du même nom », mais bien « qui a donné son nom à ». Impossible, donc, de parler de la famille Rothschild et de la banque éponyme. Compris ? Et « espèce », soit-dit en passant, est toujours – toujours – féminin, même s’il est suivi d’un masculin.
Quant à l’anacoluthe, elle n’est autre qu’une « rupture ou discontinuité dans la construction d’une phrase », explique Larousse. un exemple ? « Rentré chez lui, sa femme était malade. » Le sujet change après la virgule, laissant pendouiller la phrase. On lui préférera : « Lorsqu’il rentra chez lui, sa femme était malade. » Ha mais.
L’ouvrage contient bien d’autres règles croquignoles, et bien plus compliquées – aux futurs lecteurs de les découvrir. Allez, pour finir, cette méchante coquille publiée en une du Monde en octobre 2008, et relevée par Muriel Gilbert : « Nicolas Sarkozy a renoncé à extrader l’ancienne militante des Brigades rouges Marina Petrella […]. Cécilia Bruni-Sarkozy lui a annoncé personnellement la nouvelle. » C’est bon ? Vous l’avez ?
[/Jean-Baptiste Legars/]