Chimpanzés du futur
« Vous connaissez les OGM : des organismes vivants dont on modifie le patrimoine génétique, par exemple en y introduisant un gène d’une autre espèce. Avec la biologie de synthèse, les chercheurs poussent la folie au-delà de la manipulation : ils fabriquent de la vie en laboratoire.1 » Comment ? En bidouillant de l’ADN par ordinateur pour en tirer du vivant artificiel. Les industriels en feront de nouveaux carburants, plastiques, bactéries ultra-résistantes et autres organismes « reprogrammés ». Jusqu’à ce que le vivant artificiel décime le vivant sauvage ou s’hybride avec lui.
Le 25 avril, l’Observatoire de la biologie de synthèse tenait son premier débat public pour, nous dit la ministre de la Recherche, « désamorcer les craintes que l’opinion publique peut éprouver à l’égard d’un domaine émergent2 ». En fait de débat, un pince-fesses entre scientifiques du Commissariat à l’énergie atomique et du Génopole d’Évry, sociologues de l’innovation, journalistes et pinailleurs subventionnés de France nature environnement et Sciences citoyennes. Pendant que les crédits affluent vers les centres de recherche, on demande au citoyen de donner son avis, qui sera confiné dans un rapport, lequel aboutira à des préconisations avec lesquelles les industriels se torcheront…
Masques, banderole, tracts et prise de parole. Une quinzaine de « chimpanzés du futur » a perturbé le « débat ». « Participer, c’est accepter », scandaient-ils contre les illusions participatives orchestrées par Pierre-Benoît Joly, sociologue, et François Kepes, du Génopole. C’est que leur opération de com’ est retorse. On est prêt à tout entendre, mais les contradicteurs sont fagocytés par l’organisation de l’événement, les sciences humaines et la philosophie mises à contribution, les considérations éthiques et sanitaires désarmorcées… La démocratie technique avance et, que le public se déplace ou non, elle est déjà un argument pour intensifier le pillage du vivant.
1 Alerte à la biologie de synthèse et aux aliens de demain, Pièces et main-d’œuvre, avril 2013.
2 France Inter, 27 juin 2012.
Cet article a été publié dans
CQFD n°111 (Mai 2013)
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Paru dans CQFD n°111 (Mai 2013)
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Mis en ligne le 01.07.2013
Dans CQFD n°111 (Mai 2013)