Quand je dis qu’on s’est habitués, ça signifie que lorsque ces clabaudages sont dits (et redits, puis répétés encore) par les droites dominantes (et par de gros bouts de la « gauche » du tribord), on n’y prête plus guère d’attention. Car ils leurs sont, dans l’époque, aussi naturels que la psalmodie qu’en économie rien n’est plus émerveillant que la « réforme ».
Mais hélas : chez nous aussi, dans notre gauche plurielle [1] à nous, on entend, de plus en plus souvent, des trucs un peu déplaisants. Et ça, franchement ? C’est beaucoup plus préoccupant.
Dans tout l’Occident, la haine antimusulmane gangrène l’espace public – et le débat afférent. Les Yankees se mettent dans la White House un dément de compète, flanqué d’une équipe où le racisme anti-muslims, parmi d’autres (évidemment), court de l’alpha jusqu’à l’omega. De ce côté-ci de l’Atlantique, plus un jour ne s’écoule, qui ne soit rythmé par les divagations islamophobes des forgerons de l’opinion – tendre l’oreille, pour plus de détails, aux continuelles proférations de MM. Fillon ou Valls (et penser aussi à jeter un regard un peu attentif aux couvertures des magazines). Mais voilà que si tu pointes, ni plus ni moins que lorsqu’il s’agit d’autres phobies sorties des mêmes cloaques mentaux, qu’il y a dans ces assauts quelque chose qui n’est tout simplement plus tolérable, d’aucuns, parmi les tiens, procèdent au contrôle de ton identité politique. Soudain, te voilà suspect : cette nausée qui te prend au spectacle d’une population jetée en pâture aux loups de la démagogie n’induit-elle pas, finalement, que tu es aveugle, par exemple, aux aliénations religieuses – puis, à la fin, compréhensif aux assassins de l’État islamique ?
Étonnant affaissement, où l’antiracisme doit en somme, et tout d’un coup, s’accompagner de mille précautions, oratoires à tout le moins, et de la précision que tu n’es pas complètement con – ni totalement rétif aux intérêts de l’irréligion…
Franchement, y a pas plus urgent ?
[/Sébastien Fontenelle/]