Violences policières

En Belgique aussi la police tue

Depuis le début de l’année, en Belgique, au moins quatre personnes sont décédées suite à l’intervention de la police. Alors que juges et tribunaux couvrent l’institution policière, familles et militant·es tentent de connaître la vérité et d’obtenir justice.

Le 2 juin dernier à Bruxelles, Fabian, 11 ans, roule en trottinette électrique lorsqu’il croise une patrouille de police. Du fond de leur SUV, ils décident de prendre l’enfant en chasse, semble-t-il parce qu’il n’avait pas l’âge légal pour conduire ces trottinettes. Les policiers s’engagent alors à toute allure sur la pelouse d’un parc public et finissent par tuer Fabian l’écrasant de leur véhicule. Il était 17 heures 50, l’heure où les enfants jouent.

En Belgique, les courses-poursuites sont régulièrement létales et font l’objet de luttes pour un plus fort encadrement légal

Cette affaire n’est pas un cas isolé. Au premier semestre 2025, au moins trois autres personnes sont mortes suite à l’intervention des forces de l’ordre : Christophe-Amine Chollet, 21 ans, percuté le 12 mai par un policier qui conduisait sans permis, Jidel, 9 ans, renversé le 18 juin et Adem, 19 ans, mort dans un accident le 28 juin dernier après une course-poursuite. En Belgique, les courses-poursuites sont régulièrement létales et font l’objet de luttes pour un plus fort encadrement légal. Si les autorités font preuve d’une grande opacité sur le nombre de personnes décédées au contact de la police, les travaux d’ONG et de militant·es, tels que ObsPol, Getting the Voice Out ou Bruxelles Panthères donnent certains indicateurs. En 2023 par exemple, ce sont au moins 9 personnes qui sont mortes à la suite d’une intervention policière. Et derrière, une même mécanique se met en place : alors que les médias dominants relaient en priorité les discours des autorités et présentent les victimes, pratiquement toujours issues de l’immigration, comme des criminels, la répression s’abat sur les mouvements de solidarité et l’institution judiciaire protège une police raciste.

Les familles en lutte

Alors, ce sont les proches eux-mêmes qui se retrouvent à chercher les témoins, les images, les preuves, afin de comprendre ce qui s’est passé, produire des contre-enquêtes et des contre-récits. Pour se donner une chance dans ce combat inégal, des comités se forment : « Justice pour Adil », « Justice pour Mehdi », « Justice pour Lamine », « Justice pour Sourour », « Justice pour Imad » et tant d’autres encore. En parallèle, plusieurs collectifs militants apportent leur soutien aux familles. Outils solidaires contre les violences policières (OSVP) est l’un d’eux. Il voit le jour en 2020 : l’année du confinement, des mobilisations BlackLivesMatter, et de la mort d’Adil Charrot, 19 ans, percuté volontairement sur son scooter par une voiture de police.

Carla, membre d’OSVP raconte : « Quand Adil a été tué, il y a eu un véritable mouvement dans son quartier qui a duré plusieurs jours. C’est par la suite que nous avons eu l’idée de faire le lien entre les différentes familles de victimes, et de réunir tous les outils dont celles-ci pouvaient avoir besoin. Car bien souvent les familles qui perdent un proche à cause de la police se trouvent en situation de précarité. » Trouver des avocat·es spécialisé·es, organiser des manifestations et des événements pour récolter de l’argent, médiatiser les affaires : pour OSVP, les moyens d’aider les proches des victimes sont nombreux. « Souvent le premier désir des familles, c’est de faire appel à la justice d’État  », ajoute Carla.

Dans cette quête, c’est un mur qui s’érige contre les familles. En ce même mois de juin, un non-lieu1 a été prononcé dans l’affaire Mehdi Bouda, tué à 17 ans le 20 août 2019. Le jeune homme a été percuté sur un passage piéton par une voiture de police qui roulait à 98 km/h sans sirène et à contresens. Après 6 ans et déjà un long parcours de lutte pour la famille, la justice refuse qu’un procès ait lieu. Pire, les parties civiles, dont la famille, sont condamnées à payer un dédommagement de 18 000 euros aux policiers responsables. « On a été condamné pour avoir choisi le chemin de la justice », résume le frère de Mehdi.

Sam Amaro

Cet article fantastique est fini. On espère qu’il vous a plu.

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1 Décision par laquelle le juge d’instruction déclare qu’il n’y a pas lieu de poursuivre en justice.

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CQFD n°244 (septembre 2025)

Pour cette rentrée agitée politiquement et socialement, on vous propose un dossier sous le signe de détente (pas tant que ça) : les jeux vidéos. Une industrie bien capitaliste reproduisant toujours les mêmes dominations. Mais certains·es irréductibles luttent pour déconstruire tout ça. Allez, à vos manettes ! Hors dossier, on analyse de la hausse des droits de douane, on prend des nouvelles (pas très bonnes) des indépendantistes Kanaks jugés devant les tribunaux, on donne la parole aux pompiers du Sud, en première ligne face au incendies et on s’intéresse aux violences policières en Belgique.

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