Démocrachien

Fait chaud. Normal, c’est l’été. Dans la rue, le Chien rouge, fuyant comme à son habitude la lumière pour l’ombre ne voit pas à l’instant cette femme venant à contre-jour. Profitant de l’hésitation canine, elle lui adresse doucement la parole : « Pouvez-vous me consacrer quelques secondes ? » Le molosse réingurgite, par bienséance, sa langue. « On n’a pas de chef. Et puis aussi, on n’a pas de subvention. » L’animal dresse l’oreille. « Et puis vous savez, c’est pas normal dans une société qu’il n’y ait pas d’équilibre. » La truffe du clébard s’humidifie. « Qui est cette femme ? Se ferait-il qu’une femme, oui, une femme, eusse rejoint les rangs de l’équipe marseillaise de CQFD sans qu’on ne m’en informasse ? », pense-t-il par devers lui, alors qu’à nouveau son appendice lingual s’éjecte, vibrant, d’entre ses crocs. « À qui le dites-vous, Madame, je crains que nous ne soyons engagés sur le même navire ! » Elle s’émeut : « Vous aussi, vous comptez sur messieurs Bolloré, Lagardère, Bouygues et Arnault… » Elle soupire : « Heureusement qu’on va quand même toucher 100 millions d’euros de subventions publiques pour les cinq années à venir » tout en tendant une photo de Jean-François Copé. Le cabot carmin n’a pas même le temps de s’interroger sur le goût que peut avoir un être habitué à lécher les puissants que déjà sa langue humide s’étale sur le visage de la dame. Avant de rejoindre l’ombre, non sans s’être débarrassé d’un crachat des relents nauséeux de make-up.

Par Rémi.
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Paru dans CQFD n°113 (juillet 2013)
Dans la rubrique Ça brûle !

Par L’équipe de CQFD
Mis en ligne le 16.07.2013