Mille « zieux » au beurre noir
Le plan 1000 caméras, censé combler le déplorable retard de Marseille en termes de vidéosurveillance, a été activé cet hiver sans qu’aucun indice ne permette de supputer une quelconque visée électoraliste de la part de ses promoteurs. Cinquante mâts métalliques ont été fichés en terre aux angles des rues les plus passantes du centre-ville. Il s’agit visiblement d’en imposer. À présent, les terrasses des bars les plus populaires du quartier de La Plaine sont surplombées par un œil à fibre optique qui épiera les apéros et le moindre échange de papier à rouler. Cette intrusion est jugée au minimum exagérée, mais le fatalisme risque de vite reprendre le dessus. Quelques faits isolés, pourtant, témoignent d’un mécontentement certain. Une nuit, un tractopelle a pris feu. Une autre nuit, quatre ou cinq mâts ont été déboulonnés. Une chorale sardonique a fait le tour du quartier en réclamant « des caméras jusque dans nos chiottes ». Des pamphlets circulent. Samedi 17 décembre, un charivari masqué a déambulé, armé de caméras en carton. Sur son passage, un mât s’est veulement couché, là, en plein jour. Un autre pylône s’est vu affublé d’un gros œil en carton-pâte par une équipe de joyeux voltigeurs. Une effigie en papier mâché de la déesse Vidéoprotection a été brûlée au milieu du marché. Ce qui n’empêchera pas l’édification, boulevard Salengro, d’un centre de gestion de toutes ces images, où trente agents analyseront vingt-quatre heures sur vingt-quatre leur valeur ethnographique.
Voir aussi « Vitrine brisée ».
Cet article a été publié dans
CQFD n°96 (janvier 2012)
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Paru dans CQFD n°96 (janvier 2012)
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Mis en ligne le 20.02.2012
Dans CQFD n°96 (janvier 2012)
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