Livres : Chez soi, à l’abri du monde capitaliste

C’est un bouquin dense, érudit, accessible, comprenant de nombreuses entrées de lecture. Chacun y trouvera de quoi nourrir sa réflexion. La journaliste féministe Mona Chollet s’y livre à un plaidoyer en faveur du foyer, «  base arrière où l’on peut se protéger, refaire ses forces, se souvenir de ses désirs ».

Ce repli domestique afin de se ressourcer, seul ou à plusieurs, se heurte à d’évidentes limites : la gentrification des centres-villes condamne l’essentiel de la population à vivre dans des logis exigus ou à s’exiler dans de lointaines périphéries, donc à subir les affres des migrations pendulaires. Citant à foison le roman Oblomov, Gaston Bachelard, Raoul Vaneigem, Virginia Woolf, E. P. Thompson et Hartmut Rosa, l’essayiste interroge son propre rapport au temps  : « [Son] quadrillage et [sa] confiscation correspondent à une volonté d’exploiter la main-d’œuvre aussi complètement que possible. » Quand et comment prendre le temps de vivre ? Au fil des pages s’esquisse le profil de la maison idéale, et par extension, de la vie telle que nous devrions la consommer quotidiennement  : résister au capitalisme en dormant (ou en prenant le temps de dormir !) ; militer pour un revenu garanti afin d’alterner les périodes de salariat avec celles où l’on crée, réfléchit, se repose ou œuvre pour la collectivité ; s’organiser pour vivre ensemble dans des lieux autogérés (squats) ou coopératifs. Finalement, cet essai est un manifeste hédoniste de notre temps, un précieux objet à ne pas manquer.

Mona Chollet, Chez soi, une odyssée de l’espace domestique, Zones-La Découverte.

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