Jésus, reviens !

Quand on pense CFDT, tout de suite viennent les qualificatifs de « traîtres » ou de « vendus ». Il se dit aussi que pendant l’esclavage, la CFDT aurait négocié le poids des chaînes. Existerait-il quand même, dans la maison dirigée par Notat, Chérèque et maintenant Laurent Berger, des syndicalistes cédétistes soucieux de vraiment défendre les intérêts des salariés ? La question est loin d’être incongrue, surtout lorsqu’on fréquente les représentants de ce syndicat dans ma boîte.

Ce 16 mars, au matin, tous les militants syndicaux élus, CGT, CFDT, CFTC et CGC, ainsi que la direction de Borealis, sont convoqués au tribunal d’instance de Rouen, salle des contentieux professionnels. La salle n’est pas très remplie et la plupart des convoqués ont décliné l’invitation. Quelques affaires passent rapidement. La plupart sont des conflits entre des salariés et leurs dirigeants, pour des élections professionnelles douteuses, pour des heures supplémentaires non reconnues ou encore pour des rapports houleux entre patrons et syndicats sur des chantiers du BTP. Le quotidien du salariat. Concernant Borealis, on se trouve sur un autre registre et d’ailleurs la présidente s’en étonne. C’est une jeune juge plutôt marrante (si !) qui se moque un peu de la CFDT qui est à l’origine de la plainte.

Par Efix.

Revenons un peu en arrière sur les évènements qui ont conduit tout ce beau monde devant la justice. En décembre dernier ont eu lieu les élections professionnelles. Le résultat a été le même que les autres années, à savoir que la CGT (même en légère perte de vitesse) reste en tête, suivie par la CFDT, et la CGC qui progresse timidement. La CFTC, malgré une campagne démagogique, n’a réussi à gratter que peu de bulletins en sa faveur. La nouvelle loi sur la représentativité syndicale est impitoyable : avec moins de 10% des voix, l’organisation de défense des travailleurs chrétiens n’a plus d’heures de délégation dans les instances, comme le comité d’établissement, et se retrouve donc dans un état de nudité des plus christiques. Pour autant, son délégué a fait une demande pour avoir un représentant syndical au CE. C’est une question d’usage. Cela se faisait auparavant dans la boîte et la CFDT, en son temps, en avait également profité. La CGC a appuyé dans ce sens de même que la direction, pleine de mansuétude envers ce syndicat qui signe tous les accords qu’on lui présente. La CGT aurait eu de bonnes raisons de marquer son refus : la CFTC, avec son discours populiste et clivant (montant les fabricants contre les administratifs, par exemple), n’avait-elle pas tenté de capter quelques-uns de ses soutiens en s’adressant à la même population de prolos ? Elle s’est pourtant abstenue de tirer sur l’ambulance. 

C’est donc de la CFDT que l’estocade judiciaire est venue. Histoire d’enfoncer le clou dans la croix de la CFTC, les cédétistes ont porté l’affaire devant le tribunal, eux qui n’ont jamais attaqué la direction de la boîte ! La juge s’est d’ailleurs inquiétée de cette absence d’aménité envers des « camarades de lutte ». Dans la salle, les avocats déblatèrent pour savoir par quel bout prendre cette affaire tant le vide jurisprudentiel est intersidéral, du fait que c’est une loi récente. En quête d’une issue, la juge demande à la CGT son sentiment. On parle d’usages, de démocratie et tout le tralala. La juge semble acquiescer, mais osera-t-elle créer un précédent ? On ne le saura que dans un mois. 

Pourquoi un tel acharnement de la CFDT à l’encontre d’un allié dès qu’il s’agit de s’aplatir devant la direction de l’usine ? Rappelons que la CFDT est un syndicat de contremaîtres qui goûtent assez peu la présence de prolos dans les réunions feutrées avec le patron. Les militants CFTC font taches dans le paysage avec leurs manières grossières et leurs esclandres qui tombent à plat. Les voir débarrasser le plancher semble être une opportunité à saisir. Ça c’est du syndicalisme !

Dernière fourberie en date des cédétistes, leur participation, le 20 mars dernier, aux côtés des dirigeants du secteur de la plasturgie et des industries papetières au « premier symposium inter-conventionnel du dialogue social ». Étaient également présents, avec le Medef, les ministres Macron et Rebsamen pour «  redéfinir les périmètres et les limites de l’action syndicale ». Surtout les limites, puisque cet aréopage était invité à « réfléchir sur l’existence des conventions collectives en supprimant la culture des avantages acquis » !

À l’extérieur, une manif de salariés venus d’entreprises en lutte tentait de ramener les débats à quelques urgences plus concrètes…

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