Je vais bien

Par Thierry Guitard.

Dans une voiture du métro, une petite blonde bien en chair dont le corsage décolleté dévoile les bretelles de son soutien-gorge interprète Véronique Sanson en braillant  : « Quand on a personne/ On se sent tellement minable/ On voit des choses abominables/ On se demande s’il vaut mieux pas passer ailleurs… »

Insupportable, interminable ! On la paierait bien pour qu’elle passe ailleurs, mais elle ne fait même pas la quête. Interrompue par le « Ta gueule  ! » que lui profère un passager excédé, elle s’adresse avec aplomb à l’assistance indifférente  : « Je ne fais pas ça pour l’argent, moi… en plus, ça me casse la voix  ! Je vous le confesse, c’est fini l’hôpital psychiatrique. Maintenant je vais bien, je m’en suis sortie grâce au chant, je suis heureuse ! »

Elle quitte d’un air digne le wagon à la station Art-et-Métiers, reprenant avec plus de vigueur  : « Quand on a personne/ On se sent tellement minable… », pour gagner d’un pas alerte le compartiment suivant, d’où sa voix nous parvient agréablement assourdie et lointaine.

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