Quai des miracles : À la page

Par Thierry Guitard.

Dans la rame du métro, fatigués par une interminable journée de labeur, les voyageurs ayant l’incommensurable chance de bénéficier d’un siège somnolent tandis que les autres debout luttent agglutinés autour de la barre verticale. Une jeune fille au teint olivâtre vêtue d’une robe à pois avec un fichu dépareillé sur la tête entre dans le compartiment à la station Les Halles et de sa voix juvénile harangue avec un fort accent les passagers  : « Je viens de Syrie où c’est la guerre, j’ai perdu mes parents, s’il vous plaît donnez-moi de l’argent pour manger ». Elle excite la compassion de quelques âmes charitables qui se débarrassent auprès d’elle de leur petite monnaie. Remerciant ses bienfaiteurs avec effusion, elle descend à Châtelet en faisant tinter la ferraille récoltée dans son gobelet en carton.

C’est sur la ligne Boulogne-Pont de Saint-Cloud qu’on la recroise quelque temps plus tard, reconnaissable à sa robe, son fichu et son accent aux origines indéfinies. Seul son discours s’est transformé  : « Je viens d’Ukraine où c’est la guerre, j’ai perdu mes parents, s’il vous plaît donnez-moi de l’argent pour manger. »

Si son petit laïus lucratif repose sur l’actualité des belligérances entretenues sans répit à travers le monde, elle n’est pas près de chômer  !

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