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Samedi 28 février. La nouvelle tient la France en émoi. Martin Bouygues, révolutionnaire du béton, libérateur des mass medias et chantre des partenariats public-privé-privé, nous a quittés.

Martin voit le jour en 1952. Fils de Francis Bouygues, fondateur d’un empire du BTP, il a 22 piges et le seul Bac en poche quand il trouve, coup de chance inouï, un job bien payé dans la boîte à papa, en qualité de conducteur de travaux. Fini le gauchisme et les drogues douces, place à la réalité… Il devra quand même attendre ses 37 ans pour être propulsé PDG de la boutique familiale au salaire annuel d’un à deux millions d’euros selon le cour des stock-options. Comme le béton et la télé c’est rigolo cinq minutes, Martin investit aussi dans la téléphonie et l’Internet. Choqué par la violente concurrence de Free, Martin lâche, écœuré  : « Je me suis acheté un château, ce n’est pas pour laisser les romanichels venir sur les pelouses  ! » C’est vrai que pour un bâtisseur de maisons pavillonnaires, rien n’est plus répugnant que les vagabonds. Mais, la vie de château n’est pas sans tourments, ainsi, il se chamaille avec son ancien copain de classe (sociale et de CM1), Vincent Bolloré, qui avait essayé de lui piquer ses parts (de cake à l’école puis de sa boîte de BTP en 1997). Depuis, ils se font la gueule... ce qui explique que, par solidarité, les maçons qui bossent pour Bouygues aient toujours refusé d’aller sur le yacht des Bolloré, ce qui n’est pas le cas de Sarkozy. Sarkozy, ce « frère », dont Martin fut le témoin de mariage (avec Cécilia) et le parrain du petit Louis. C’est sous la présidence de Nicolas que Bouygues a pu s’octroyer quelques juteux contrats, comme le Pentagone français à Paris, des stades, etc. Pourtant certains mauvais esprits gardent en mémoire les déboires de ce grand capitaine d’industrie  : jugé en correctionnelle, en 2014, pour travail dissimulé à l’EPR de Flamanville, ou épinglé en Finlande pour des manquements graves à la sécurité sur le chantier de l’EPR, sans oublier les centaines d’ouvriers morts sur les gigantesques chantiers qataris, qui lui font de la mauvaise pub. Le Monde diplomatique de mars rappelait encore l’entente sans réserve de Martin avec le dictateur Niazov du Turkménistan, où l’on bétonne à tout-va...

Nous apprenons à l’instant que l’annonce de la mort de Martin Bouygues est due à un lamentable emballement qui a tenu en haleine les médias pendant une petite demi-heure. Le temps suffisant pour que quelques professionnels de la lèche manifestent leur obséquiosité vis-à-vis du pouvoir économique – « Un grand entrepreneur », twittait Jean-Michel Apathie ; « Grande tristesse en apprenant la mort de Martin Bouygues  : grand patron et homme intègre », surenchérissait Laurence Ferrari. Le ouf de soulagement fut prononcé par Manuel Valls qui a jugé de son devoir de twitter un petit smiley après s’être entretenu avec le brave Martin  : « Content d’avoir eu Martin Bouygues au téléphone et de partager son étonnement. » En tout cas la nécro est prête.

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