Prélude à l’autogestion généralisée

« Le ciel est sous nos pieds comme au-dessus de nos têtes. » La citation d’introduction, signée H. D. Thoreau, au Principe démocratie (La Découverte) est certes bien roulée. Mais pourquoi persiste-t-on à recourir à une symbolique religieuse bécassote quand on nous exhorte à la révolution immédiate ? Non, mille bombardes  !, trois fois non, nous ne voulons pas du paradis sur terre puisque le paradis, c’est le royaume (fuck !) de Dieu (fuck !) où les âmes (fuck !) des justes (bof) jouissent de la béatitude (fuck !) éternelle (pin-pon  !).

Trêve de chicaneries, il faut remercier Albert Ogien, le grand sachem de l’Institut Marcel-Mauss, et la prof de philo Sandra Laugier d’avoir su mener bathement leur enquête sur les nouvelles insoumissions auto-organisées visant à « la démocratie réelle ». Pour nos deux larrons, ce qui caractérise les sursauts réfractaires d’aujourd’hui (les rassemblements et les occupations, les mises en cause des pouvoirs, les mobilisations transnationales, les insurrections civiles, l’activisme informatique, etc.), c’est qu’ils abouchent de plus en plus la poursuite romantique du bonheur individuel avec les desiderata collectifs toniques des vingt dernières années (le respect de l’environnement, la mise en place d’une économie solidaire, la recherche de modes de vie alternatifs…). Autrement dit, même si l’on aimerait voir cela exprimé d’une façon plus rock and roll, trouvons ensemble prestement «  la forme de vie qu’appelle la revendication de démocratie ».

S’il y a bien un camerluche qui peut rire au nez des corniauds pour qui un anarcho-communiste ça veut tout détruire, baaoum  !, sans être fichu de mettre quoi que ce soit d’autre à la place, c’est André Danet. Ce Danet de la terre s’avère être en effet un sacré lascar. Dans le très éclaircissant Finir la révolution  ! (Éditions de l’Épervier), après avoir mis le doigt sur les insuffisances, selon lui, des expériences libératrices historiques, de la Commune, de la Révolution russe, des soulèvements espagnols de 1936 à mai 68, il indique avec un aplomb que j’ai trouvé plutôt réjouissant, on n’est jamais, pour moi, trop cavalier, quelles devraient être, juste après le grand soir, les premières mesures à prendre pour empêcher tout retour en arrière. Alors, attention les cocos, accrochez-vous bien. Voici ce que propose aux masses insurgées, en gros, André Danet dans la société soudain réimaginée.

1. La démocratie représentative est remplacée par la démocratie directe.

2. Le principe de base aimantant la révolution, c’est l’autogestion généralisée qui abolit les anciens pouvoirs.

3. La propriété privée ou publique est remplacée par une propriété collective des moyens de production qui appartiennent maintenant à chaque intéressé, travailleur, consommateur, usager.

4. À tous les niveaux, les « membres des nouvelles instances de la démocratie » sont tirés au sort.

5. On substitue à l’argent de nouveaux modes d’échanges.

6. On libère tous les prisonniers.

Naturellement, si l’on est allumé par le programme gonflaga d’André Danet, on peut aussi commencer par la fin  : ouvrir toutes les prisons. Et peut-être, tant qu’on y est, ouvrir également toutes les fourrières.

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