Suspension des contrats aidés en PACA

« Pause technique » pour les précaires

Selon la préfecture de Provence-Alpes-Côte d’Azur, les caisses sont vides : impossible d’assurer, d’ici la fin de l’année, la création ou le renouvellement de contrats aidés dans le secteur non marchand. Sophie, comme nombre de chômeurs et précaires, en fait les frais.
par Berth

À 26 ans, une licence professionnelle en poche, elle a déménagé pour trouver du travail. Pour rien. L’été dernier, une fois ses études terminées, Sophie1 a demandé à bénéficier du RSA puis s’est lancée dans la fameuse « recherche active d’emploi » que tout chômeur se doit de mener sans rechigner. « J’ai très vite compris, précise l’intéressée, que les offres du secteur culturel sont le plus souvent soumises à des contrats aidés. » Les contrats aidés, ce sont ces boulots dont l’État assure 70 à 90 % du salaire, tel le fameux Contrat unique d’insertion (CUI), et théoriquement réservés aux personnes « rencontrant des difficultés sociales et professionnelles ». Allez, va pour un CUI : « J’ai trouvé un poste de chargée de production dans une association culturelle à Marseille, un CDD en emploi aidé, 26 heures par semaine payées au Smic. » Un temps partiel pour 800 euros net mensuel, à 1 200 kilomètres de chez elle – Sophie est bretonne –, c’est Byzance. Mais c’était sans compter la décision du gouvernement de suspendre ces contrats dans les régions ayant épuisé l’enveloppe budgétaire impartie, et ce jusqu’à la fin de l’année. Le 28 octobre, en Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), c’est par le truchement des Pôles emploi que la nouvelle a été annoncée aux acteurs du secteur non marchand – associations culturelles, éducatives ou sociales, et certains services publics. « L’État a atteint son objectif avec deux mois d’avance », soit près de 44 000 contrats aidés pour un montant de 301 millions d’euros, a déclaré la préfecture à l’AFP. Manque de bol, Sophie avait déjà commencé à bosser.

« Le 13 octobre, j’ai signé mon contrat de travail avec l’association. Et je devais, dans un second temps, signer le CUI avec le Pôle emploi de la Joliette. » Ne restait qu’une petite tracasserie administrative à régler pour décrocher le précieux sésame : faire transférer son dossier RSA de la caisse d’allocations familiales du Morbihan à celle de Marseille. Un dossier qui n’a pas eu le temps d’arriver à bon port : « Fin octobre, j’ai appris le gel des CUI dans les Bouches-du-Rhône par un coup de téléphone de Pôle emploi. J’ai tenté de négocier, mais la conseillère m’a dit que ce n’était pas possible… » L’employeur, une association culturelle qui survit bon an, mal an, grâce à la reconduite de ses contrats aidés, ne peut maintenir son poste sans l’aumône gouvernementale. Et revoilà notre Sophie au chômedu. « Dire que j’ai déménagé de Bretagne pour ce job ! s’énerve l’éconduite. Heureusement que je n’ai pas pris une location tout de suite… »

Depuis, le préfet a annoncé la création de 1 100 contrats supplémentaires pour les « secteurs prioritaires » que sont « les ateliers et chantiers d’insertion, les assistants de vie scolaire qui assurent l’accompagnement des élèves handicapés, et les adjoints de sécurité ». De la culture, il n’en est point question. Le tout récent Collectif Paca-emplois aidés recensait récemment plus de quatre cent soixante chômeurs et précaires dans le cas de Sophie. Le 18 novembre, le représentant du préfet les aidait à relativiser en déclarant qu’il ne s’agissait que d’une « pause technique ». « Ça veut dire quoi ? roumègue une membre du collectif. Les gens ne vont pas s’arrêter de respirer en attendant 2011 ! Nous voulons une véritable politique de l’emploi. Dans les associations, on ne peut assumer le coût réel des salaires, puisqu’ils nous réduisent les subventions. Et maintenant, c’est au tour des contrats aidés. C’est un double désengagement ! »

Quant au RSA de Sophie, fin novembre, il se baladait toujours entre la Bretagne et la cité phocéenne : « Je ne suis toujours pas réinscrite. Mon dossier étant en transit, je n’ai ni boulot, ni RSA pour ce mois-ci. » C’est rien, juste une petite « pause technique »…


1 Le prénom a été modifié.

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1 commentaire
  • 5 janvier 2011, 11:23, par cyclomal

    Quand je lis que priorité a été donné aux « assistants de vie scolaire qui assurent l’accompagnement des élèves handicapés », je pense à tous ces notables qui s’en font attribuer un pour le confort de leur rejeton qui jouit déjà de nombreux passe-droits, ici dans l’Aude. Pauvre France, l’immigration ne suffira pas à te sauver...

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