Mais qu’est-ce qu’on va faire de… Pierre Gattaz ?

« Il faut chasser en meute. » Tel est le gimmik de Pierre Gattaz, le tout nouveau patron des patrons. Il vient en effet d’être élu avec 95 % des voix à la tête du Medef, le 3 juillet dernier, après diverses alliances de couloir dignes de l’élection du Soviet suprême. Pierrot, le nouveau chef de meute du lobbying libéralo-entrepreunarial, est avant tout un « fils de ». Son père, Yvon Gattaz, a été en effet président du Conseil national du patronat français (ancêtre du Medef) sous les années Mitterrand. Connu pour sa passion des syndicats, pépé Yvon aimait à les qualifier de « nuisibles » de « gréviculteurs » et « d’araignée syndicale » arguant que « les performances des entreprises sont inversement proportionnelles à leur taux de syndicalisation.1 »

Cependant Pierre n’est pas qu’un « fils de », c’est aussi un fils à papa. Après avoir débuté à Dassault Électronique, il dirige depuis vingt ans l’entreprise familiale, Radiall, créée par son père et son oncle en 1952, spécialisée dans l’électronique et où siègent toujours pépé Yvon, sa sœur et son cousin. Pas étonnant car pour Pierre Gattaz « l’entreprise est le plus bel endroit au monde après la famille2 »…

Fervent partisan des grandes politiques industrielles à la Pompidou, Gattaz incarne une certaine idée de la droite industrielle au bon goût de paternalisme : « L’entreprise, c’est la plus belle aventure humaine, déclare-t-il. Vous y créez des richesses, de l’emploi, et c’est une machine à intégrer : les jeunes, les populations défavorisées, les minorités… Par le travail, ils trouvent de la dignité.3 » Merci patron, y a bon la dignité ! Au sein d’une des usines Radiall, Guy Manin, représentant CGT du personnel lâche même : «  Il y a un paternalisme incroyable ici. J’ai rencontré Gattaz, qui m’a fait comprendre que la lutte des classes, c’était terminé.4 »

Mais celui pour qui l’entreprise est « la solution à la majorité de nos problèmes » et offre à ses salariés « tout simplement un sens à la vie5 » est surtout un obsédé de la baisse du coût du travail et de la fin des 35 heures. Car la fabuleuse machine à intégrer et à donner de la dignité que serait l’entreprise sauce Gattaz est avant tout une machine à cracher du pognon. Avec un salaire de 300 000 euros par an, Pierrot n’hésite pas à embaucher dans sa boîte de l’intérimaire à gogo et à installer ses usines au Mexique, en Inde ou en Chine. De même, durant la campagne pour la présidence du Medef, Pierre Gattaz, avec son sourire affable et sa bonhommie de petit patron local, martelait sans cesse qu’il voulait « un Medef de combat contre la crise mais apolitique [sic !] » et que « les 35 heures font partie de ces dogmes qu’il faut revoir avec les partenaires sociaux. Le mieux c’est de le faire dans l’entreprise.6. »

Par Lasserpe.

Autres temps mais mêmes mœurs, le 3 juillet dernier, lors de son discours d’intronisation, Pierre Gattaz a ressorti les classiques du Medef. Après avoir déclaré que « la France est un jardin envahi par les ronces et par les cailloux », il a égrainé le chapelet patronal : la fin des 35 heures, le relèvement de l’âge légal du départ à la retraite, le très poujadiste « moins de charges, moins d’impôts » sans oublier des envolées lyriques (« Les chefs d’entreprises sont des héros !  ») et d’autres plus alarmantes (« Il faut que l’Éducation nationale se rapproche fondamentalement de l’entreprise  »). Mais n’ayons pas peur, car comme le dit Pierrot, « nous avons tout pour plaire : des start-up, des PME, des entreprises de taille intermédiaire, des pôles d’excellence. Il faut juste qu’on y croie !7 » C’est comme la grève générale, il suffit juste d’y croire !


1 Le Monde, 28 août 2010.

2 Valeurs actuelles, 27 juin 2013.

3  Libération, 13 juin 2013.

4 Rue 89, 2 juillet 2013.

5 Les 7 piliers de la croissance, Pierre Gattaz, Nouveau Monde Éditions, 2013.

6 Libération, 8 avril 2013

7 Usine nouvelle, 21 juin 2010.

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1 commentaire
  • 3 octobre 2013, 14:30

    Si ce (pas vraiment pauvre-)type veut rétablir un pouvoir patronal digne des maîtres de forges, il fera face à un renouveau syndical. Les mêmes causes donnent souvent les mêmes effets.

    Et pas le syndicalisme pépère actuel en train de crever de ses connivence quasi généralisées dans l’entreprise, au point de ne plus guère arriver à mobiliser. Mais un syndicalisme de combat face au patronat idoine, qui mènera de nouveau à traiter ce Gattaz et ses semblebles comme il aura su le mériter.

    Car dans la vie, Mr Gattaz, on récolte toujours ce que l’on sème... Alors pensez-y avant de promouvoir votre rêve digne d’un dignitaire chinois d’une main d’oeuvre corvéable et docile. De plus en plus de gens n’ont déjà plus trop à perdre, à trop insister ils réaliseront un jour leur nombre et leur force.

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