Bientôt trois mois de grève

Les femmes de chambre luttent (toujours)

En grève depuis le 11 avril à Marseille, les onze salariées d’Elior, sous-traitant de l’hôtel de luxe NH Hôtel, tiennent toujours leurs piquets. Pour l’instant, pas de quoi faire plier la direction, mais un brin d’espoir à l’horizon.

« Avec la canicule, les piquets de grève devenaient un enfer, les filles commençaient à déprimer un peu. Là, le moral revient, c’est une lueur d’espoir. » Camille, salariée de la CNT-SO, le syndicat des onze grévistes du NH Hôtel du boulevard des Dames, à Marseille, n’est pas encore tout à fait sereine. Mais la nouvelle est bonne : le préfet demande à la direction d’Elior et aux salariées de désigner un « médiateur conjointement choisi ». Surtout, la direction nationale de l’entreprise a repris le dossier en main, et semble plus encline à discuter que son homologue régionale. Les actions menées par les grévistes auront fini par payer un peu.

Lors d’une visite express à Madrid, quelques-unes, soutenues par la CGT espagnole, ont manifesté devant un hôtel NH, à défaut d’être reçues au siège du groupe. Et à Marseille, elles sont allées faire pression devant un autre établissement de la multinationale hôtelière, sur la corniche. « La bonne nouvelle, c’est que l’hôtel a l’air de prendre les choses en main, indique Camille. Au début, ils faisaient profil bas et laissaient Elior décider, mais là ça va bientôt faire trois mois, donc ils réagissent. » Des accords tacites auraient d’ailleurs été conclus. « Dans les luttes, observe la juriste, c’est généralement l’hôtel, et rarement le sous-traitant, qui finit par prendre en charge les demandes des salariées. » La caisse de grève, renflouée à l’occasion de plusieurs événements de soutien, parvient toujours à compenser les semaines non travaillées. Mais la syndicaliste espère quand même obtenir des indemnités de grève pour les salariées.

Vis-à-vis des pouvoirs publics, la situation reste tendue. Début juin, deux grévistes et deux syndicalistes CNT-SO ont passé 24 heures en garde à vue1, après une arrestation brutale. Deux jours d’ITT (interruption totale de travail) pour l’une, six pour l’autre, avec au final trois semaines d’arrêt de travail. L’une des deux avocates, Clémence Lachkar, ne comprend pas : « Ils ont arrêté une gréviste, alors qu’elle ne faisait rien, elle n’a pas du tout résisté. Puis tout le monde a protesté et là, la situation s’est tendue : un policier a étranglé une deuxième gréviste, en serrant sa tête entre son flanc et son bras, sous son aisselle ; une des syndicalistes [enceinte de huit mois, NDLR] est tombée, ils l’ont arrêtée, ainsi qu’un autre syndicaliste venu l’aider. » Les quatre ont été placés en garde à vue pour « violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique ».

Pour le moment, il n’y a eu aucune convocation devant la justice. Une situation en suspens, à l’image des négociations autour des revendications des grévistes (treizième mois, majoration de 50 % le dimanche, deux jours de repos consécutifs par semaine). À Bastamag2, une des femmes de chambre a confié : « On va rester là, et c’est nous, les femmes de chambre, qui allons gagner. » C’est dit.

Margaux Wartelle

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1 Les deux syndicalistes avaient déjà subi une garde à vue au mois de mai.

2 18/06/2019.

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