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De quel peuple est ce gilet ?

24 janvier 2019, 17:36, par Jean-Claude Leyraud

Le Gilet jaune est-il réversible ?

J’ai apprécié le dernier numéro de CQFD sur les Gilets jaunes qui rend compte de la diversité des composantes du mouvement. Retraité de CQFD, on ne s’étonnera pas à ce que je fasse appel à des idées qui avaient cours « autrefois » dans les années 1970, pour tenter de prolonger la réflexion.

S’il y a une difficulté à cerner le profil du gilet jaune, tiraillé qu’il est entre le bon gros réac, la femme consciente et l’anar qui s’ignore ou se revendique, c’est bien parce que l’individu « définitif » n’existe pas : il est aliéné par son mode de vie, par les circonstances qu’il a connu, par son isolement surtout. Ceci dit, ce n’est pas parce qu’il est aliéné, comme tout un chacun, qu’il aurait, par dessous, une « vraie nature » qui ne demanderait qu’à sortit la tête de l’eau.

L’aventure qui survient de sa vie, se relier à d’autres sur un rond-point, au point de ne plus vouloir se quitter, c’est former une communauté, ce qui n’a rien à voir avec ce communautarisme aux relents de lendemain de fête. Autrefois, on qualifiait cette expérience d’émeute, et il y a de ça dans les Gilets, mais il est plus sûr de parler du rétablissement de la faculté de rencontre. Cette faculté, à la faveur de circonstances exceptionnelles, est supposée arrêter la dégradation de l’individualité et la rendre efficiente, autrement dit faire face aux situations inédites et prendre les bonnes décisions. C’est un accès unique à la pensée pratique, et il est évident que cette dernière ne peut se maintenir qu’aussi longtemps qu’elle est en mesure de modifier le réel. Dès que le terrain redevient défavorable, c’est-à-dire dès que revient la séparation, l’expérience cesse. Et n’en déplaise aux intellos qui croient avoir des idées personnelles, il faut être au moins deux pour avoir une idée. Plutôt que le Grand soir, il faut parler de moments d’insurrection qui surviennent dans l’Histoire et se prolongent plus ou moins en fonction de la conscience que le monde a de lui-même. Et cette conscience ne s’incarne pas nécessairement dans des idées abstraites, qui ont toujours un temps de retard, mais dans des décisions pratiques. Les Gilets jaunes font la critique de la représentation politique, les intellos doivent mener à bien la critique des idées. Chacun de nous doit savoir ce qu’il a à faire dans la mesure où le mouvement des Gilets jaunes se mêle de ce qui le regarde : organiser la vie.

Jean-Claude Leyraud

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