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« Winter is coming »

13 janvier 2015, 22:02, par Pram

Il y a longtemps, très longtemps, la CGT faisait ce combat-là : se battre pour le droit de travailler en français en France. Mieux encore, je me rappelle l’époque ou le personnel qui maîtrisait d’autres langues dans le cadre de leur travail avait droit à des primes de langue comme à la SNCF. Maintenant si la maîtrise de l’anglais n’est pas acquise au préalable c’est de plus en plus le droit au chômage.

En fait cette pratique et cet usage de l’unilinguisme anglais sur le plan technique ou professionnel n’est même pas du bilinguisme de bon aloi, mais une sort d’ambilinguisme propre aux sociétés et aux peuples minoritaires. Voir les Québécois ou les arabophones de l’Algérie de papa ou encore l’anglicisation de l’Irlande, même après son indépendance. Voir la russification en Ukraine, justifiée par Lénine lui-même. J’y reviens plus loin. L’assimilation linguistique imposée dans le cadre du travail est au moins aussi puissante que par le moyen du cadre scolaire.

Certains osent nous dire que dans le cadre de la mondialisation, tous nous devons subir ce genre de contrainte. Mais ils oublient de préciser que cette contrainte ne s’applique pas à tous puisque les anglophones ont le privilègent inouï d’être les seuls à ne pas être au chomage s’ils ne sont pas bilingues. Et que l’on ne fasse pas un parallèle avec le statut du latin au Moyen-âge ou celui de la "lingua franca" en Méditerranée. Ces vernaculaires n’étaient la prérogative d’aucun peuple à cette époque. Contrairement à l’anglais aujourd’hui.

Je vais vous citer un passage de Lénine qui illustre de manière explicite comment il pouvait participer lui-même à une russification typiquement grand-russe qu’il prétendait dénoncer par ailleurs. Ce passage illustre la prescience de Lénine à propos de la meilleure efficacité de l’assimilation linguistique par les contraintes de l’organisation du travail de l’économie libérale (développement du capitalisme en Russie) que par les méthodes de la persécution bureaucratique grand-russe, y compris stalinienne : Le discours léniniste est au moins aussi colonial que les discours civilisateurs des empires occidentaux. Aujourd’hui ce sont des discours culpabilisateurs qui prévalent : « Comment vous n’êtes pas bilingue (anglophone s’entend...) ? Quelle ringardise ! Il y a aussi un autre discours beaucoup moins gentil : « Apprenez l’anglais si vous ne voulez pas être déclassé (au chômage) dans votre propre pays... »

Revenons à Lénine, c’est une lecture d’un "réalisme" cru... : « Nous pensons que la grande et puissante langue russe n’a pas besoin qu’on oblige qui que ce soit à l’apprendre sous la menace de la trique (idem). Nous sommes persuadé que le développement du capitalisme en Russie et, d’une façon générale tout le cours de la vie sociale, conduit à un rapprochement mutuel des nations. (...). Ceux qui par leurs conditions de vie et de travail ont besoin de connaître le russe l’apprendront sans encourir la trique. Quant à la coercition (la trique) elle aura pour seule conséquence de gêner la pénétration de la grande et puissance langue russe dans les autres groupes nationaux.... » Tiré de : "Faut-il une langue officielle obligatoire ?" (1914) in « Lénine et les questions de langue », Moscou, 1982.

Tout est dit : "les conditions de vie et de travail..."

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