Rafle

Valls avec les bleus

À Paris, le 6 juin dernier, alors que la mort de Clément Méric occupait toutes les attentions émues, une rafle de sans-papiers, comme on n’en avait pas vu depuis des lustres, se déroulait à Barbès.

Instant émotion. Ce jeudi 6 juin après-midi toutes les caméras sont braquées vers les rassemblements à la mémoire de Clément Méric. La gôche PS y va de son petit mot d’indignation contre l’extrême droite, même si Harlem Désir ou Anne Hidalgo se font dégager des cortèges. Manuel Valls, lui, main sur le cœur, évoque devant les caméras sa famille qui a fui le fascisme espagnol. Mais au même moment, à Barbès, c’est un autre rassemblement, bien loin des caméras, qui s’opère.

«  Vers 15 heures, on a vu débarquer depuis Gare du Nord des dizaines de fourgons de CRS, mais aussi des policiers en civil, témoigne Moussa. Ils étaient plus d’une centaine et, par petits groupes, ils ont commencé à bloquer les rues en faisant des barrages et à demander les papiers à tous ceux qui passaient. » Pendant près de deux heures, CRS et policiers en civils quadrillent l’ensemble du quartier et mettent en place de véritables check-points où les papiers d’identités et autres titres de séjours sont systématiquement vérifiés pour qui rentre ou sort de la zone. Des cars vides sont stationnés le long du boulevard de La Chapelle en attendant de se remplir de ce gibier pas assez « white » ou «  blancos » pour les pandores et leur ministre. Vendeurs de clopes à la sauvette, marchands ambulants de boissons et autres jeunes qui « tiennent les murs »… la panique est de mise et ceux qui se sentent traqués se réfugient dans les bars, les boutiques de téléphone ou au rez-de-chaussée de Tati. « De mémoire, on n’avait pas vu ça dans le quartier depuis vingt ans, à l’époque où de nombreux sans-papiers habitaient encore dans des squats à Barbès. Pour certains chibanis, le coup des check-points de CRS, ça leur a même rappelé les rafles à la Goutte d’or pendant la guerre d’Algérie… », raconte un vieux militant associatif du quartier.

Par Rémi

On comptera plus de quatre-vingts interpellés menottés et embarqués fissa au commissariat de la rue de Clignancourt, certains sont interpellés directement dans les halls d’immeubles et les cafés. En effet, pendant l’opération, des flics en civil balaient les rues et fouillent les moindres recoins, prétextant même des contrôles d’hygiène dans les restaurants et les cafés.

Au final, trente-trois personnes devront passer devant le juge pour défaut de titre de séjour avec un passage, dès le lendemain, par la case Centre de rétention administrative de Vincennes… « Avec Manuel Valls, on est dans la continuité des mêmes politiques que sous Sarkozy, témoigne Bahija, militante du 9e collectif des sans-papiers1. À la préfecture, on a déposé depuis fin 2012 plusieurs dossiers de régularisation et nous n’avons aucune nouvelle : il y a une vraie rupture du dialogue de leur part. À travers une circulaire du 28 novembre 2012, Valls a annoncé clairement qu’il ne régulariserait pas plus de 30 000 personnes et n’en expulserait pas moins que sous le gouvernement de droite. Pour nous, l’arrivée de la gauche, c’est le changement dans la continuité…  » Alors que les interpellés de Barbès s’entassaient à vingt par cellule au commissariat de la rue de Clignancourt, le soir même, Manuel Valls, déclarait, à propos des groupuscules d’extrême droite : « Il faut s’attaquer aux idées nauséabondes qui nous rappellent les pires heures de notre histoire.  » Cherchez l’erreur.


1 Voir CQFD N°113 : "Le changement dans la continuité".

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