Les galériens cloués au pilori

Le 26 janvier dernier, dans les Vosges, Xavier Bertrand (ministre du Travail) a fait une proposition remarquable. Celle de rendre public par voie de presse le nom des fraudeurs aux allocations sociales : « Je pense que tout jugement devrait entraîner la parution dans la presse de l’identité des fraudeurs et de la nature de la fraude. Pourquoi ? Parce que je veux un effet préventif pour dissuader les fraudeurs. Il ne s’agit pas d’être dur pour être dur, il s’agit tout simplement d’être juste. » Il n’y a pas d’illustration plus claire du fonctionnement des allocations sociales pour le gouvernement : chaque dette contractée vis-à-vis de l’État est autant un gage de paix qu’une promesse de guerre. Un gage de paix, puisqu’il est question de réduire au silence cette « pauvreté assistée », rencontre de la précarisation généralisée et des héritiers de la pauvreté laborieuse. Volonté politique, pour le gouvernement, de rendre aphone collectivement ses propres débiteurs tout en leur demandant, individuellement, de se dévoiler, de devenir en toute sincérité un auto-entrepreneur de sa propre vie. La promesse de guerre est, ici, réductible à ce simple énoncé : la vérité ou l’exhibition au mépris public. La vérité sur soi, sur son intimité, bref sur sa vie, est la contrepartie de la dette morale et économique que chaque allocataire contracte vis-à-vis de la société. Nous sommes tous endettés, donc tous potentiellement coupables. Et aux sorties moyenâgeuses du vil Bertrand nous répondons : coupables de tous les pays, unissez-vous !

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