Édito

Hands up, don’t shop  !

Jour de soldes à Ferguson, Missouri, USA. Quelques dizaines de manifestants se massent aux abords du centre commercial Arden Fair Mall pour appeler les badauds à les rejoindre plutôt que d’aller remplir leurs obligations consuméristes de fin d’année. Quelques jours auparavant, le flic qui a abattu le jeune Noir Michael Brown a été acquitté. « Hands up, don’t shop  ! ». Les mains en l’air, ne consommez plus  !, hurlent les manifestants. à New York, des milliers de personnes déboulent dans les rues  : « Out of the stores  ! », sortez des magasins  ! En haut lieu et chez les éditocrates, on s’étonne de ces slogans. Tout ceci n’a rien à voir  ! Un Afro-américain tué par la police et la sacro-sainte consommation, autant chercher un quelconque point de convergence entre la vie sur Mars et la mort subite des abeilles. Et pourtant. Un des mots d’ordre psalmodié par George W. Bush dans les suites du 11-septembre fut le mantra  : « Go shopping  ! » Variante postmoderne du dormez, braves gens  !

Domaine public.

A un bout de la chaîne, des matières premières pillées dans les sous-sols de pays pauvres ; seconde étape  : leur transformation en marchandises par les esclaves de pays qui n’en finissent plus d’émerger ; terminus les linéaires de ­magasins, hyper et super, ­imbriqués dans ces zones commerciales où la vie se résume à des flux embouteillés, des mains avides, des pupilles dilatées. Consommez, citoyens  ! Vous connaissez Karolyne Smith ? Cette jeune Américaine a mis son front aux enchères pour s’y faire tatouer une marque. Ce fut une chaîne de casinos qui remporta l’affaire. Depuis, sous la frange couleur blé de Karolyne, on peut lire  : « Golden Palace.com ». Le brandon était une pièce de fer portée à incandescence qui servait à marquer le bétail. Plus tard, il servit à marquer les esclaves. Brandon a donné le mot « brand ». Marque, en français. En scarifiant son visage pour le compte du business über alles, Karolyne boucle la boucle. Sans le savoir, elle nous rappelle le péché des origines. « Hands up, don’t shoot  ! ». « Les mains en l’air, ne tirez plus !  », scandent les peuples désireux de pouvoir se retrouver en dehors des labyrinthes de la consommation, de Ferguson au Caire en passant par Sivens. Dans une missive adressée à la ministre de la Justice, Chloé Fraisse et d’autres frères et sœurs de victimes de la police indiquaient  : « Oui, l’impunité policière tue les Noirs, jeunes et moins jeunes, sur le territoire américain. Mais elle tue aussi les Noirs, les Arabes, les Rroms, les jeunes de quartiers, et récemment un simple manifestant écologiste, sur le territoire français. » Il n’y a pas de complot.

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