À travers les villes imaginaires et les cités-laboratoires

Le binocle bakouninien au bout du nez, faisons un petit tour dans les livres récents axés sur la réimagination de la vie sociale.

« Utopie, j’écris ton nom » (Les Arènes), le n°16 de la revue XXI du « journalisme debout » sans pubs, commence mal. On y ramasse toute l’histoire de l’utopie en trois noms : le cagot Thomas More, le prosaïque Voltaire (dont le Candide préfère l’agriculture potagère à la ripaille dans l’Eldorado) et le révérend Martin

par Rémi

Luther King. Après, ça va mieux. Car c’est sans complaisance qu’on y explore la cité-laboratoire Auroville où l’on cultive bio, où l’on fusionne avec la nature, on l’on se shoote au supra-mental sous la houlette d’une « espèce d’État centralisé qui contrôle tout ». Et qu’on assiste à la résurrection d’un village d’Ardèche à travers la relance épuisante de la dernière filature de la région.

Olivier Chaïbi sort aux éditions L’Harmattan la biographie fort bien fricassée de Jules Lechevalier, pionnier de l’économie sociale (1806-1862), un sympathique illuminé totalement méconnu qui propagea la pensée de Fourier, Proudhon et Saint-Simon. « Passant du rêve à l’outil », il tenta, en 1839, de faire surgir une contre-société « associationniste » en Guyane dont la première mesure aurait été d’abolir l’esclavage puis « d’acheter des esclaves à l’étranger pour les émanciper sur les terres françaises ». On peut étudier aussi, mais avec le recul féroce et agacé qui s’impose, L’Éthique de la liberté de Murray Rothbard (Les Belles Lettres), la profession de foi des libertaliens américains (1982) prônant un appariement visqueux entre la propension à la liberté individuelle maximale des anarchistes et la religion toxique du laisser-faire des capitalistes. C’est également à un compromis anti-utilitariste cracra entre le socialisme, l’anarchisme, le communisme et, pouah !, le libéralisme, que vise Pour un manifeste du convivialisme (Le Bord de l’Eau) d’Alain Caillé, un zigomar autrement inspiré il y a une décennie quand il boulonnait sur l’anthropologie du don.

Pour se requinquer, y a heureusement, orchestré par Jean-Noël Mouret (Mercure de France), Le Goût des villes imaginaires où l’on dérive youpitamment avec comme guides Maurice Leblanc, Tristan Tzara, Italo Calvino, Lovecraft, Berlioz, Pérec, Borges, Féval, Poe et le génial feuilletoniste séditieux Gustave Le Rouge.

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